Photo: Makine F. Les termes de sens et symboles de la révolution utilisés dans la déclaration du 1er Novembre 1954 sont les mêmes que ceux de la moubayâa de l'Emir Abdelkader. C'est ce que l'universitaire constantinois, Ahmidah Amiraoui, constate à l'issue d'une étude qu'il a présentée hier à l'occasion du colloque international sur l'Emir Abdelkader, qui se tient à Alger, et inauguré par le président de la fondation Emir Abdelkader, Mohamed Boutaleb. «La déclaration du 1er Novembre 1954 est inspirée du texte de la moubayâa de l'Emir non seulement dans son concept mais également dans les systèmes politiques auxquels elle fait référence», estime-t-il. La plate-forme du congrès de la Soummam en août 1956, ajoute-t-il, est également inspirée du texte de l'allégeance à l'Emir et que le chercheur et anthropologue, Zaïm Khenchelaoui, qualifie «d'extrait de naissance» de l'Etat algérien. «Il faut savoir qu'il y avait, à l'époque de l'Emir, plus d'un pouvoir en Algérie. Il y avait le pouvoir ottoman, celui des «chikhi» (tribus et confréries) et le pouvoir européen, dit le pouvoir intrus. La moubayâa est adoptée comme outil pour libérer l'identité algérienne de ces pouvoirs, pour la définir et faire de l'Algérie un Etat entier, égal aux autres Etats», explique le conférencier. L'Algérie, selon ses dires, est l'unique pays en Afrique du Nord à avoir adopté le système de la moubayâa. «L'adoption de ce système par l'Algérie n'était pas du goût de la France mais aussi des pays voisins dont le régime était centré sur le pouvoir tribal», explique-t-il en soulignant que l'œuvre de l'Emir Abdelkader se caractérise par une grande ouverture qui lui a permis de passer de la famille à la tribu, du village à la ville et du national à l'international. Par ailleurs, l'Emir «le soufi» est évoqué lors de la première journée de ce colloque. Peut-être un peu trop, selon certains participants à cette manifestation. «Le soufisme chez l'Emir a été trop abordé. Nous avons besoin de connaître les autres facettes de la vie de l'Emir, celui du combattant notamment», révèlent certaines critiques. A ce propos, l'universitaire turc Dülger Kerar, a proposé des documents inédits sur l'Emir, classés dans les archives ottomans, dans lesquels la vie de l'Emir, de sa famille et de ses proches sont cités. «Avant de partir en Syrie, l'Emir s'est d'abord rendu en Turquie où il est resté trois ans. J'ai mis la main sur 120 documents dont des lettres échangées entre l'Emir Abdelkader et le sultan ottoman. Il reste un bon nombre de documents concernant l'Emir qui ne sont pas encore recensés», fait-il savoir. Martine Le Coz, écrivain française qui a grandi au pied du château d'Amboise, là où l'Emir a été détenu durant 4 ans, témoigne d'un guerrier «qui n'a jamais cédé à la tentation de goûter à la violence.» «C'était un chef d'Etat intègre qui avait un profond respect pour l'être vivant. C'est un exemple à suivre», conclut-elle.