L'une sinon la principale fonction du journalisme est de faire savoir ce qui se passe. Au mieux de le faire voir. L'histoire a retenu alors que la télévision n'avait pas encore une telle influence que des images comme celle de la fillette vietnamienne brulée au napalm de Nick Ut ont eu plus d'impact que n'importe quel écrit. Pour paraphraser la devise d'un célèbre magazine, si les mots ont certes un poids, le choc provient d'abord des photos. Le XXe siècle a été l'âge d'or de la photographie qui a immortalisé des scènes de guerre, de la vie quotidienne ou des visages d'acteurs. Les archives des agences sont aussi des livres d'histoire. Le photo reportage bousculé aujourd'hui par la vidéo était à l'honneur. Qu'importe le pouvoir de manipulation des images, l'usage orienté et malsain qu'on en a fait. On a presque toujours de la peine à imaginer un journal sans la photo qui en constitue la vitrine. Il y avait toujours cette chambre noire où l'on procédait, cerné d'odeurs acres et acides à des manipulations et des attentions dignes d'un chercheur d'or. Un service photos est un rouage essentiel dans une rédaction. A l'heure de la société des apparences et du tape à l'œil qui oblige même de prestigieuses et austères publications à faire place à l'image, cette exigence trouve aussi écho dans les journaux algériens qui hélas ne font encore des services photos que de simples faire-valoir. La photo a encore une fonction utilitaire, voire de simple illustration mécanique des événements. Elle se suffit rarement à elle-même et, dans bien des cas, se retrouve en décalage avec l'article. Trop souvent, on prend peu de temps pour le choix des images qui comblent davantage un vide qu'elles ne remplissent autant sinon plus que le texte dans l'information du lecteur. La photographie de presse a beaucoup changé. La scène n'est pas seulement par de nombreuses femmes qui ont montré leurs capacités pour fixer les horreurs du terrorisme et n'hésitent plus à investir qu'on crut longtemps réservés aux hommes, à l'image des stades. On a assisté à la naissance de magazines comme Nass Bladi qui fait un usage original de la photo. La mutation fondamentale provient davantage du progrès technique. L'intrusion des appareils numériques a certes donné plus de latitude et de capacités au photographe d'élargir la gamme de ses possibilités et celles de son produit. Elle a conduit aussi à la perte pour beaucoup de photographes du souci esthétique, l'œil cessant d'être le prolongement du cœur. Dans notre pays, une nouvelle embûche se dresse devant les photographes. Le terrorisme et les utilisations des nouvelles technologies pour le dévoilement des intimités a conduit à l'apparition d'une culture de la méfiance. On ne se laisse plus facilement photographier avec le sourire.