15.000 personnes, dont une pléiade d'experts, d'écologistes, de ministres de plus de 180 pays, débattent depuis lundi à Istanbul où se tient le 5e Forum mondial de l'eau, du partage équitable de cette ressource menacée par la croissance démographique,- le monde passera selon l'ONU de 6, 8 milliards de personnes en 2009 à 9 milliards en 2050- et le changement climatique qui est déjà réel selon l'Union internationale pour la conservation de la nature par les ressentis « les sécheresses, les inondations, les ouragans, la fonte des glaces et la montée des océans ». « L'eau devait être une priorité au plus haut niveau politique » déclare le président turc, Abdullah Gül, à l'ouverture de cette cinquième édition placée sous le thème «Surmonter les différends en matière d'eau». Comme tous les intervenants, il a appelé à un « suivi » réel entre les Forums de l'eau qui se tiennent tous les trois ans, avant qu'il ne soit trop tard. Certains plaident pour la mise en place d'un droit universel de l'accès à l'eau. Dès 2025, les deux tiers de la population mondiale souffriront de stress hydrique si la consommation se poursuit au rythme vertigineux actuel, prévient le Programme des Nations unies pour le Développement. Selon les experts, des dizaines de millions de personnes pourraient être contraintes de migrer pour des raisons liées à la pénurie d'eau. Naturellement, ces personnes seraient en partie originaires de l'Afrique subsaharienne où près de la moitié de la population n'a pas accès à l'eau potable pour au moins deux raisons. L'insuffisance des aides publiques consacrées à ce secteur (6%) et le montant annuel nécessaire (90 à 150 milliards de dollars) pour construire et entretenir un système d'adduction et d'évacuation performant (85% des eaux usées dues aux activités humaines sont évacuées dans la nature sans épuration). L'ONU a publié avant ce forum une mise en garde sans équivoque sur ces « crises de l'eau » qui risquent de « s'aggraver » et de s' « aiguiser » avec la concurrence entre les différents usagers: l'agriculture (70%), l'industrie (20%) et les besoins domestiques (10%). « Le temps de l'eau facile est terminé. Nous devons entrer dans des politiques de régulation de la demande » explique Loïc Fauchon, le président du Conseil mondial de l'eau, avant de rappeler deux « inégalités inacceptables » : certains Américains consomment jusqu'à 1.000 litres d'eau par jour, contre quelques dizaines de litres pour certains Africains, 80% des maladies des pays en développement (diarrhées, choléra...) sont liées à l'eau. Cette ressource qui a joué un rôle déterminant dans 37 guerres ces 60 dernières années sera t'elle au 21e siècle source de conflits locaux, régionaux et internationaux ? Notamment au Moyen-Orient. Israël figure parmi les pays les plus menacés au monde par le manque d'eau (276 m3 par an et par habitant), la Syrie et l'Irak dépendent des eaux du Tigre et de l'Euphrate dont le débit pourrait décroître de 17 à 34 % prochainement, l'Egypte partage les eaux du Nil avec 9 autres pays. Ce constat fait dire à certains experts qu'il urge d'anticiper sur les risques avant l'inauguration de la première des guerres pour l'or bleu. Djamel B.