Il est venu dans l'après-midi de samedi dernier à la libraire Média Plus pour dédicacer son dernier livre ‘'Juste un mot'', publié à compte d'auteur, mais la séance s'est vite transformée en débat plus que fructueux avec cet homme qui a passé l'essentiel de sa vie à la cinémathèque d'Alger. La discussion avec Boudjemaa Kareche a porté essentiellement sur les belles années du cinéma algérien, sur la cinémathèque qui diffusait trois films par jour : «J'ai découvert le cinéma au festival Panaf de 1969, Ahmed Houcine m'a offert du boulot en me confiant la cinémathèque durant trois mois. Il y avait jusqu'à 1500 personnes par jour. Mon travail était de regarder des films et de les sélectionner pour la projection» Malgré la sympathique ambiance qui y régnait, il était très difficile de parler cinéma, nous n'avons pu lui soutirer que quelques mots : «Depuis 2004, je ne parle plus de cinéma. Le dernier film que j'ai vu est ‘'La Chine est encore loin'' de Malek Bensmaïl que j'ai trouvé magnifique. Je suis venu parler de mon livre. Alors que j'étais depuis 1970 et jusqu'en 2004 à la cinémathèque, un beau jour on m'a dit «reste chez toi». Je préfère donc rester chez moi, dans mon monde, et cette nouvelle vie pour moi, c'est l'écriture». Non ce n'est pas un cri de détresse, ni de haine, Kareche est comme ça, nous a confié un de ses amis. Il ouvre son cœur, nous parle de ses problèmes sans pour autant demander de la charité et c'est pour cela d'ailleurs qu'il a eu l'idée de se mettre à écrire : «Comme la retraite est une misère et que je m'ennuie à ne rien faire chez moi, je réfléchissais sans cesse et je me suis mis à l'écriture. Heureusement que des amis journalistes m'ont aidé à écrire mes livres». Parlant de son dernier livre ‘'Juste un mot'' il dira : «Ce sont de petites histoires sur des gens normaux. Pour faire court, ça raconte la vie de tous les jours. Pour le titre, j'ai repris la phrase de Jean-Luc Godard qui disait «le cinéma ce n'est pas une image juste, c'est juste une image» ; ce sont donc mes images à moi qui me reviennent et que je ressens. On est dans un pays difficile mais j'ai voulu écrire sur les choses que j'aime». Evoquant la dernière polémique concernant le film de Rachid Bouchareb, Kareche nous explique son point de vue : «Bouchareb est un grand et talentueux cinéaste, il a fait de beaux films comme «Bâton rouge», «Cheb» «Poussière de vie» ou «l'Honneur de ma famille». Je n'ai pas encore vu son dernier film, mais ce que je crains, c‘est que ça peut mal tourner comme pour ‘'La Bataille d'Alger''. Mais je ne crois pas que le film connaîtra des ennuis au festival de Cannes .Il y a les intérêts derrière, ce film a coûté 20 millions d'euros, puis le prestige de Cannes est que c'est un milieu hors censure ; et s'il y a censure, je peux vous assurer que tout le monde se retirera du festival».