Pour les auteurs musulmans, le rêve a son origine dans le sommeil qui libère l'homme du monde des sens et le fait accéder au monde de l'esprit. L'encyclopédiste et polygraphe Al-Mas‘udî, qui a réalisé, dès le Xe siècle, une synthèse des connaissances sur le rêve chez les musulmans, distinguait deux types de sommeil : le sommeil absolu ou al-nawm al-kully, simple réaction physique du corps, indépendant de l'expression des sentiments et des passions et qui est le sommeil des jeunes enfants et des vieillards, et le sommeil relatif ou al-nawm al-‘ardhy, qui détache l'homme des préoccupations externes et reporte les sens vers le monde intérieur : c'est le sommeil qui favorise les rêves. Dans ce type de sommeil, la faculté de percevoir les objectifs du monde s'efface, mais la pensée du dormeur reste à l'état de veille : elle va utiliser les images recueillies et les présenter comme si elles avaient été toujours soumises à l'emprise des sens. Ce travail de la pensée donne aux choses du rêve tout leur réalisme, mais l'ordre dans lequel se déroulent les images n'est pas forcément celui de la réalité. L'âme purifiée réalise dans le rêve tous ses désirs, elle plane à son aise dans les lieux qu'elle aime et entre en possession de tout ce qu'elle désire. En revanche, l'âme impure est continuellement trompée par ses rêves. Entre les deux états se trouvent les âmes de tous ceux qui n'étant ni tout à fait purs ni totalement impurs, perçoivent, selon leur situation, des images véridiques ou mensongères.