Honte n Comme la mosquée et ce qui l'entoure sont sacrés, les esprits invisibles des lieux punissent le vieillard, en collant son postérieur au sol ! Les vieux et les vieilles sont souvent l'objet de facéties dans la littérature algérienne. Voici deux histoires racontées en Kabylie. C'est un vieillard qui vivait seul avec sa fille. la fille travaillait aux champs, faisait de menus travaux pour gagner sa pitance et celle de son père. Le vieux, lui, passait la majeure partie de son temps à la mosquée. Il y faisait ses prières, puis s'asseyait dans la cour, cherchant le soleil en hiver et l'ombre en été. Un jour qu'il était là, à somnoler, un gaz lui échappe, faisant un grand bruit. Comme la mosquée et ce qui l'entoure sont sacrés, les esprits invisibles des lieux le punissent, en collant son postérieur au sol ! Le pauvre vieux tente de se dégager, en vain. Il appelle les gens à son secours et on essaye de le relever, mais peine perdue : il est irrémédiablement collé ! On va chercher sa fille. Elle non plus n'arrive pas à le relever. Alors le vieillard se met à pleurer. — Je ne me remettrai plus debout ! La nuit, les bêtes sauvages vont me repérer et viendront me dévorer ! — Non, non, mon père, je ne les laisserai pas faire ! — Si tu restes, toi aussi, ils te mangeront ! — Je vais te faire construire une cabane que tu fermeras de l'intérieur. Chaque jour je viendrai frapper à ta porte. Tu demanderas qui c'est. Je te dirai c'est moi et je ferai tinter mes bracelets ! La fille construit donc une solide cabane. Elle la munit d'un système de fermeture interne qu'elle attache à une corde : il suffit que le vieux tire sur la corde pour que la porte se bloque. Il n'ouvre qu'à sa fille qui, chaque matin et chaque soir, vient lui faire sa toilette et lui apporter à manger. — ô mon cher père, dit-elle de sa voix fluette, ouvre-moi donc la porte ! — Fais tinter tes bracelets ma fille, répond le vieux. Elle fait tinter ses bracelets et le vieux tire la corde et la porte s'ouvre. Les jours et les semaines passent. Or, voici que les bêtes de la forêt entendent parler du vieux collé au sol et qui vit dans une cabane. Un lion veut le manger et il se met à rôder dans le village, cherchant un moyen d'atteindre le vieux. C'est ainsi qu'un matin, il voit la jeune fille apportant de la nourriture à son père. Elle se met contre la porte et dit. — ô mon cher père, ouvre-moi donc la porte ! — Fais tinter tes bracelets ma fille. Elle fait tinter ses bracelets et la porte s'ouvre. Tandis que la fille est dans la cabane, le lion se dit qu'il a trouvé le moyen d'entrer chez le vieux. «Je n'aurais qu'à faire comme la fille. Quand il me demandera de faire tinter mes bracelets, je ferai tinter des bouts de fer !» Et il rentre dans la forêt, se promettant de revenir le lendemain avant la fille. la fille, elle, a fait manger son père, puis elle rentre chez elle. (à suivre ...)