Analyse n Paru aux éditions Chihab, El Bab El Akhar (ou l'Autre porte) est un recueil de dix nouvelles. Ecrites par Khaled Bouaâli, ces nouvelles dont le contenu est inspiré du vécu et de la nature humaine, puisque toutes traitent de la condition, font revivre ses sentiments les plus reculés et latents, et font dire sa psychologie ainsi que sa mentalité, se veulent toutes une porte – d'où le titre d'ailleurs – ouverte sur l'autre monde, celui de l'intériorité, de l'invisibilité et celui de la réalité psychique, immatérielle et abstraite. Des récits où se rencontrent, voire se heurtent le réel avec l'autre vie, celle de l'imagination et de l'illusion. Tout comme s'entremêlent le passé et le présent, les superstitions avec la vérité et la matérialité des choses et des êtres. Chacune des nouvelles fait vivre aux lecteurs des situations à la frontière du commun et de l'insolite. Chacune représente des personnages à l'identité et à la personnalité à la fois différentes et complémentaires, auxquelles s'associent plusieurs émotions, à savoir la douleur, la souffrance, le désespoir, la détresse… Plusieurs sensibilités sont alors décrites avec autant de précision que de déraison dans un concentré d'absurdités. Esaqta (La Chute) est l'histoire d'Aboud, un écrivain public, qui vit dans une vétuste demeure avec sa mère, Zorfa, et son épouse, Ghenoudja. Ne pouvant supporter davantage la mésentente et les disputes entre sa mère et sa femme, et ne trouvant nulle part sa place dans le monde qui l'entoure, Aboud décide de dormir. Il passe donc tout son temps loin de la réalité, s'abandonnant ainsi aux plaisirs du sommeil. Parfois son sommeil est agité, mais Aboud arrive à la conclusion que «le cauchemar est beaucoup mieux que la réalité». Il dort alors pour ne plus jamais se réveiller ! Hamou est le personnage de la nouvelle Etalaq (Le Divorce). Le protagoniste opte pour le rêve. Il s'est marié trois fois et à chaque fois, il divorce. Il cherche et finit par trouver un moyen d'échapper au monde qui l'entoure et aux problèmes qui le consument, et cela par le rêve. Il cède donc au rêve et s'abandonne du coup à la folie. Ainsi, le recueil revient sur la nature humaine, sur son côté occulte et indécelable, une nature complexe et contradictoire, qui suscite autant d'interrogations que d'émerveillement. Il revient, en d'autres termes, sur ce qui fait de lui un homme, c'est-à-dire ses sentiments les plus refoulés et imprévisibles, et autour desquels viennent s'entourer tant de mystères, d'attirance que d'appréhension. L'homme, en tant qu'individu, apparaît, dans chacune des nouvelles qui composent le recueil, comme un objet de réflexion. L'auteur enquête sur l'homme, s'y interroge, il l'explore, et tel un psychiatre, il l'observe, l'étudie et analyse sa vie intérieure comme son imaginaire, infini et empli de croyances, de légendes, de superstitions. Il examine ses rêves comme ses cauchemars, ses peurs et ses inquiétudes, parfois sournoisement dissimulées derrière des subterfuges et des faux-semblants. Il s'emploie à le cerner, à l'identifier pour mieux le connaître, se connaître. Il y a effectivement, quelque part, une autoanalyse. Le recueil se présente, de par son contenu, tel un miroir où l'image non seulement celle de l'extérieur, mais également – et surtout – celle de l'intérieur est réfléchie. Il y a cristallisation de l'empreinte mentale de l'homme. A travers des récits où l'auteur fait abstraction du héros et ne s'intéresse qu'à l'individu au sein de la société, c'est tout l'homme qui est peint avec sensibilité, déraison et absurdité.