Résumé de la 48e partie n Eusapia est réellement douée, en matière de médiumnité, mais elle a été souvent prise, en flagrant délit de fraude. Les portraits que ses contemporains ont fait d'elle montre une femme d'aspect normal, presque anodin. Voici ce que Arthur Lévy écrit, à son sujet : «Comme presque toujours, aspect tout différent de l'idée que je m'étais faite de sa personne sans la connaître. Où je m'attendais à voir – je ne sais trop pourquoi, par exemple, – une femme grande, maigre, au regard fixe, perçant, aux mains osseuses, aux gestes saccadés, mus par des nerfs sans cesse tressautant sous une tension perpétuelle, je trouvais une femme dans la quarantaine, plutôt grassouillette, tranquille, à la chair moelleuse, aux gestes simples, un peu raccourcis, en tout, l'air d'une bonne bourgeoise. Deux choses cependant retiennent l'attention. D'abord, des yeux chargés de feux bizarres, crépitant dans le fond de l'orbite. On dirait un foyer de phosphorescences brèves, tantôt bleuâtres, tantôt dorées. Si je ne craignais pas la métaphore trop facile quand il s'agit d'une Napolitaine, je dirais que son regard apparaît comme les laves lointaines du Vésuve, en une nuit obscure. L'autre particularité : sa bouche aux étranges contours. On ne sait si elle sourit, souffre ou dédaigne.» Eusapia soulève l'enthousiasme des savants qui assistent à ses exhibitions. Le professeur Chiaia l'examine en 1891, à Naples. Le médium donne plusieurs séances auxquelles assistent d'éminents professeurs, comme Tamburini, Bianchi et Vizioli. Il y a aussi le criminologue bien connu, Lombroso, qui va se convertir au spiritisme, une doctrine qu'il a d'abord combattue. Lombroso écrit : «Je suis rempli de confusion et de regret à la pensée d'avoir combattu avec tant de persévérance la possibilité des faits dits spiritualistes.» Quant au professeur Chiaia, il ne cesse d'admirer la médium qui, selon lui, réalise de véritables prodiges, des miracles, écrira-t-il même. Voici le compte rendu qu'il fait de quelques-unes de ses prouesses. «Le cas auquel je fais allusion est celui d'une invalide qui appartient à la plus humble classe de la société. Elle a presque trente ans et est très ignorante, mais quand elle le souhaite, qu'il fasse jour ou nuit, soit attachée sur un siège, soit solidement tenue par les mains des curieux, elle attire à elle les meubles qui l'entourent, les soulève, les maintient suspendus en l'air et les fait redescendre avec des mouvements ondulatoires comme s'ils obéissaient à sa volonté. Elle accroît leur poids ou le diminue selon son bon plaisir. Elle dessine sur des cartes, personnages, signatures, nombres phrases simplement en tendant la main vers l'endroit indiqué. Si vous placez dans un coin de la pièce un vase contenant une couche d'argile molle, vous y découvrirez au bout d'un moment l'empreinte d'une main, grande ou petite, l'image d'un visage dont on peut faire un moulage en plâtre. Cette femme s'élève dans les airs, quels que soient les liens qui la retiennent à terre. Elle joue sur des instruments de musique – orgue, cloches, tambourins – comme s'ils étaient touchés de ses mains ou actionnés par le souffle de gnomes invisibles. Cette femme peut, parfois, augmenter sa taille de plus de dix centimètres.» Ces personnalités sont si enthousiastes qu'ils ne remarquent pas les «manipulations» qu'Eusapia effectue. En tout cas, ils ne parleront pas de fraudes. (à suivre...)