Discrétion Ils nous ont servis et on ne les oubliera pas. Trois chefs cuistots pas comme les autres qui ont marqué leur CAN. Mon premier est Farid Nemiri Il a été dépêché spécialement pour accompagner l'Equipe nationale à Sousse puis à Sfax pour préparer et contrôler avec minutie les plats arrêtés par le staff médical. Dévoué et discret, Farid, une belle gueule de jeune premier, n?a pas quitté d?une semelle les Verts avec lesquels il a vécu des moments très intenses. «Nous formions une véritable famille, et c?est cela qui m?a marqué le plus», nous dira-t-il avec une petite note de nostalgie à son retour à Alger. Farid était aux petits soins avec tout le monde, exécutant avec maestria les consignes du médecin de l?équipe tout en répondant au moindre caprice de nos chers internationaux, un peu plus de sauce pour l?un, une petite fantaisie pour l?autre et va les bonnes odeurs de la cuisine. Le couscous a été le plat préféré des Verts, mais son meilleur coup durant la CAN 2004, c?est ce succulent méchoui qu?il a lui-même préparé le jour de l?Aïd et que les convives de l?Equipe nationale ont beaucoup apprécié. Farid a, depuis son retour, repris sa place à l?hôtel El-Aurassi avec l?espoir de revivre un jour une autre aventure avec cette sélection qui nous a tant fait rêver. Mon deuxième est Tunisien et porte le nom d?un illustre footballeur Belloumi. Kamel, pour les intimes qui l?ont côtoyé à l?hôtel Tej Marhaba, est un sacré chef cuistot. Bardé de diplômes, y compris celui de parachutiste, Belloumi s?est pris d?une amitié sincère avec les journalistes algériens logés dans cet établissement cinq étoiles. Ils ont tous été chouchoutés par ce chef taillé dans une simplicité et une humilité peu coutumières. Mais son pote à lui, c?était notre ami Mustapha de l?hebdo Le Buteur auquel il glissait quelques bonnes friandises sous le manteau. N?est-ce pas Mus ? Toutes ces montagnes de salade que tu ingurgitais ou ces délicieux flans au caramel qu?il te refilait en douce. Belloumi est un brave type qui a passé toute la journée du 9 février 2004, c?est-à-dire le lendemain du fameux match de Sfax, à nous aider à réparer les dégâts qu?avait subis notre véhicule. Avec sa bonhomie et son sens de l?humour populaire, il nous a un peu fait oublier nos malheurs. Mon troisième se surnomme Steve Tout le monde au Sousse Palace, notre gîte soussien durant la CAN, l?appelle ainsi même s?il est Algérien et «mis themourth» de surcroît. Marié à une Allemande, qui lui rendait visite justement à l?occasion de cette Coupe d?Afrique, Steve ne s?est pas empêché un instant de la draper de l?emblème national et de l?emmener au stade olympique de Sousse pour soutenir les Verts. Bon vivant, Steve est un oiseau de nuit qui adore faire la fête jusqu?au petit matin malgré le gros boulot qu?il se tapait aux cuisines puisqu?il est, lui aussi, le chef incontesté. Il a souvent essayé de nous embarquer dans ses escapades nocturnes, mais nous tombions tellement de sommeil que nos rendez-vous restaient toujours sans lendemain. Steve adore l?Equipe nationale et a suivi toutes ses rencontres, sauf celle de Sfax où il n?a pas pu se libérer. Dommage, car il aurait aimé être parmi les siens pour frissonner aux chants des supporters. Sa plus belle performance, c?est d?avoir préparé 240 ?ufs au plat (qu?il appelait «ouyoun») pour une délégation de touristes égyptiens en moins de deux heures ! Voilà donc l?histoire de trois hommes qui nous ont mis sous leur bonnet le temps d?une CAN. Trois hommes friands de bonnes tables et amoureux fous de foot.