InfoSoir : Comment qualifiez-vous les essais nucléaires français dans le Sud algérien ? l Me Benbraham : Les essais nucléaires français en Algérie sont des crimes de guerre et des crimes contre l'humanité. Ils sont considérés comme tels par les textes et les lois qu'ils ont eux-mêmes adoptés et signés, c'est-à-dire selon le traité de Rome du 17 juillet 1998. Quelles sont les poursuites qui doivent être engagées contre la France ? l Tout criminel doit être puni. Sauf que dans ce cas, le crime est un crime d'Etat. Ce n'est pas un crime personnel, ou une personne doit être jugée. Donc, aujourd'hui il est temps de parler de crime d'Etat et d'instaurer des tribunaux spéciaux pour juger les crimes coloniaux. L'Algérie a commencé, le Maroc, mais aussi d'autres pays sont en train de nous suivre. Qu'en est-il de la loi adoptée récemment par le Sénat français pour l'indemnisation des victimes de ces essais nucléaires ? l Elle ne nous concerne pas, et nous sommes complètement exclus de cette loi. C'est regrettable pour la France mais ça ne l'est pas pour nous. Car nous, au moins nous avons appris deux choses : Premièrement avec cette loi, la France reconnaît par des textes qu'elle a fait des essais nucléaires en Algérie et que ces derniers étaient impropres. Elle reconnaît aussi qu'elle a fait subir des dommages qu'elle doit donc réparer. Mais tout ceci ne nous concerne pas, ça concerne les Français, car c'est un lien qui établit que cette loi est pour les Français et les Polynésiens qui sont sous domination française. Donc nous sommes complètement exclus. Nous avons uniquement retenu qu'elle a reconnu ses crimes contre l'humanité. Justement pourquoi la France a attendu 2009 pour adopter cette loi ? l La France n'a jamais voulu reconnaître ses crimes. Si elle a reconnu aujourd'hui son infraction et son crime, c'est grâce aux demandes et à l'insistance des vétérans, mais aussi aux demandes que nous avons formulées et les éléments qui lui ont permis de ne plus aller vers une négation. C'est fini, maintenant le crime est là et il est connu, il vient d'être reconnu devant le monde entier. Donc la France doit répondre de tous ses crimes. *Avocate et présidente de l'instance algérienne de lutte contre la pensée coloniale.