Menace n Les services de sécurité et de contrôle ont rarement mis la main jusqu'ici sur de faux médicaments fabriqués localement ou introduits frauduleusement dans notre pays. Dans la plupart des cas en effet, les saisies concernent des produits périmés. Pour autant, cela ne veut pas dire que le phénomène n'existe pas chez nous ou que nous en sommes à l'abri. Le risque zéro n'existe pas, insistent les professionnels du secteur pour qui la contrefaçon de médicaments n'a pas de frontières. Et comme notre pays a des frontières avec des pays subsahariens où les médicaments, tout comme la quasi-totalité des produits, échappent à tout contrôle, il y a lieu de s'inquiéter. Pour le président du Syndicat national des pharmaciens d'officine (Snapo), Messaoud Belambri qui s'exprimait lors de la 5e Journée du pharmacien, organisée à l'hôtel Sheraton d'Oran en 2009, entre 70% et 80% des médicaments consommés en Afrique sont contrefaits, ce qui n'est pas fait pour nous rassurer. Il faut dire que les contrebandiers ne reculent devant rien pour se faire de l'argent. S'adonner au trafic de cigarettes ou à la commercialisation de faux médicaments, c'est du pareil au même pour eux. Ce qui compte, ce sont les profits tirés. Et sur ce plan, «le trafic de médicaments est en train de passer devant celui de la drogue», selon certains experts. «La contrefaçon pharmaceutique est une entreprise très lucrative en raison d'une forte demande et des coûts de production peu élevés», a fait remarquer M. Belambri. Un comprimé de faux Viagra coûte 0,05 dollar à fabriquer et le bénéfice est de 6 000 à 20 000%, note à ce propos l'OMS. Autre facteur qui pourrait alimenter ce commerce illicite, la pénurie de certains médicaments. Lorsqu'un diabétique, par exemple, ne trouve pas d'insuline chez son pharmacien, il peut bien se tourner vers les réseaux informels pour s'en procurer. Aussi, «les prix appliqués à certains traitements indispensables pour les personnes souffrant de pathologies lourdes tels les cancers et les maladies cardiaques sont de nature à encourager le recours aux produits de contrefaçon réputés pour leurs «petits prix». Il y a également les dysfonctionnements constatés au niveau de la chaîne de distribution qui pourraient faciliter l'introduction de faux médicaments sur le marché. Enfin, l'acquisition de médicaments via Internet – une pratique pas très courante fort heureusement chez nous – est susceptible d'alimenter cette forme dangereuse de contrefaçon à l'avenir. Pour résumer, ce n'est pas parce que les saisies de faux médicaments sont insignifiantes que nous pouvons nous endormir sur nos lauriers et dire : «Cela n'arrive qu'ailleurs.» La vigilance doit être de mise et en permanence.