Résumé de la 3e partie n Plongé dans ses pensées et sa rencontre avec Yvonne, Luciano Lutring, dans le hall d'un immeuble de Paris, continue à perdre son sang… Sa rencontre avec elle date de mai 1958. Il se promène alors sur la plage de Viareggio, presque déserte. Il réfléchit depuis des semaines à la proposition que lui a faite Aimé Bertucelli, le caïd corse : devenir le chauffeur de sa bande, et il ne sait pas encore s'il va accepter. Soudain, son regard est attiré par un sac à main abandonné sur le sable. Il lance un autre regard en direction de la mer. Il appartient sans doute à cette jeune femme en train de se baigner au large. La tentation est la plus forte. Luciano prend le sac et, par curiosité, il l'ouvre. A l'intérieur, quelques centaines de lires, des papiers d'identité au nom d'Yvonne Salvi, une Suissesse originaire de Genève. Luciano reste un moment silencieux, admiratif devant la photo. Jamais il n'a vu une aussi jolie fille : une brune aux yeux bleus irrésistibles, une vraie vedette de cinéma, qui n'est pas d'ailleurs sans ressemblance avec Sofia Loren. Alors, il repose le sac et s'installe à côté, pour attendre sa propriétaire. La jeune fille arrive quelques minutes plus tard. La carte d'identité n'a pas menti : elle fait bien un mètre soixante-treize, elle a bien les yeux bleus, elle ressemble bien à Sofia Loren... Elle esquisse un mouvement de recul en apercevant Luciano. Mais celui-ci lui lance un grand sourire. — Ce n'est pas très prudent, mademoiselle, de laisser votre sac à main sur la plage. Avez-vous pensé aux voleurs ? Heureusement que je suis resté pour vous le garder. La jeune fille sourit. Luciano sent que c'est gagné. Il lui demande son prénom – qu'il sait déjà – sa profession – qu'il ignore, mais qui le ravit : mannequin. Quand elle lui pose la même question, il lui avoue modestement qu'il est pilote de course ; enfin, apprenti pilote... Yvonne accepte sans trop de façons son invitation à dîner. Cette fois, ce n'est pas un simple flirt comme les autres. Il est attiré, fasciné par sa nouvelle compagne. Elle représente ce dont il rêve depuis toujours : une femme éblouissante qui fait se retourner tous les hommes quand elle est à son bras. Une femme dont le métier consiste à être belle, dont l'existence même ne peut se concevoir sans toilettes, sans bijoux, sans luxe. Luciano aime Yvonne et c'est un amour partagé. Par moments, il sent, sans en prendre tout à fait conscience, que c'est pour lui une manière de se contraindre à aller de l'avant, à enfin franchir le pas qu'il n'osait pas encore faire. Pour aimer Yvonne comme elle le mérite, il lui faut rompre avec son passé : avec sa mère qui n'acceptera jamais cette union avec un mannequin, avec son existence médiocre. Pour elle, il lui faut gagner de l'argent, beaucoup d'argent... Mme Lutring, qui ne reconnaît plus son petit enfant chéri depuis lontemps, accueille avec des débordements de désespoir le projet de mariage de son fils. — Une fille de rien ! Une créature ! Songe qu'elle ne pourra jamais être une digne mère pour tes enfants ! Mais Luciano ne se soucie guère de sa réaction. Au contraire, il est soulagé. Maintenant, il peut aller trouver ce petit homme quelconque, aux allures de fonctionnaire rangé, qui lui a toujours fait un peu peur, et lui donner sa réponse. — Monsieur Bertucelli, je vais me marier. Mais si vous voulez bien me laisser quinze jours pour notre voyage de noces, tout de suite après je serai votre homme. A partir de ce moment, Luciano Lutring devient vraiment ce qu'on appelle un gangster. Au volant des puissantes voitures italiennes qu'il est chargé de voler, c'est lui qui pilote la bande sur les lieux des hold-up, et c'est grâce à lui qu'elle parvient, en plusieurs occasions, à s'échapper, après de folles poursuites avec les carabiniers. (à suivre...)