«La perte de la morale collective, la corruption, l'exploitation abusive des richesses naturelles font que nous allons tout droit vers l'appauvrissement.» C'est l'une des conclusions tirées, hier, par le Dr Ahmed Benbitour lors d'une rencontre ayant pour thème : «La pauvreté est-elle une fata-lité ?» organisée au siège d'Amnesty International. M. Benbitour a précisé également que «nous sommes en train de construire le chemin de l'appauvrissement qu'on impose aux futures générations». «Le système de développement actuel mène à l'appauvrissement.» Il expliquera en effet que «l'économie algérienne s'est spécialisée dans la transformation d'une ressource non renouvelable en une ressource volatile». «Nous sommes en train de dilapider des ressources en consommant le pétrole et le gaz sans pour autant les utiliser pour créer de nouvelles richesses susceptibles de générer une valeur ajoutée à notre économie.» Les raisons sont multiples : le manque d'intérêt pour l'agriculture et le désintérêt de la jeunesse qui ne rêve que de partir vers d'autres horizons sont autant d'éléments menant droit vers l'appauvrissement. L'exploitation de la rente pétrolière crée assidûment l'instabilité socioéconomique. Cela est devenu une malédiction. Il estime que la pauvreté est un manque d'opportunités, notamment en termes d'emploi, précisant qu'en Algérie la croissance économique est non créatrice d'emplois : «Le secteur des hydrocarbures représente entre 98 et 99 % des recettes d'exportation, 70 % des recettes budgétaires et 40 % du produit intérieur brut, mais ne représente que 3 % de l'emploi.» Il mentionnera, entre autres, que la pauvreté est une difficulté d'accès aux soins, à l'éducation et un manque de sécurité en l'absence de protection contre la violence, les chocs économiques ou les catastrophes naturelles. Interrogé par l'assistance sur les meilleurs moyens pouvant permettre un changement de politique, M. Benbitour a répondu que «les régimes autoritaires portent les germes de leur autodestruction, mais les changements de l'intérieur ne viennent que si plusieurs facteurs sont réunis, à l'instar des pressions internes de la société civile». Et d'ajouter : «Il faut qu'il y ait une pression de la société civile qui doit être présente mais aussi qui doit agir de façon durable pour lutter contre le fatalisme.»