L'œuvre romanesque de l'écrivain portugais José de Sousa Saramago, prix Nobel de littérature 1998, l'Ibère qui voulait se réapproprier sa «berbérité», a été au centre d'une conférence donnée vendredi en marge du XVe Salon international du livre d'Alger (Sila). Carlos Reis, recteur de l'université d'Aberta (portugal) et membre de la fondation José Saramogo, a évoqué le parcours de l'écrivain et de l'intellectuel «rebelle», récemment disparu. Plus que le style d'écriture, c'est surtout la démarche de l'écrivain dans la construction romanesque qui vaudra à Saramago une reconnaissance internationale. Dans ses écrits, qui mêlent fable et critique acerbe de l'ordre politique, social, tels que L'Aveuglement ou encore Le Voyage de l'éléphant, José de Sousa Saramago n'aura de cesse de cesse de fustiger tour à tour l'ordre religieux, le libéralisme économique, comme d'ailleurs la morale sociale et l'hypocrisie des individus, dira l'universitaire. Ses écrits lui vaudront les critiques de l'Eglise, mais aussi du gouvernement portugais. Censuré par ce dernier, accusé par les religieux de «porter atteinte au patrimoine religieux des Portugais», l'auteur quitte le Portugal en 1998 et se réfugie aux îles Canaries. C'est sans doute à partir de cette période que Saramago fera montre d'une certaine fierté à mettre en avant une lointaine origine berbère, pense M. Reis. En recevant le prix Nobel de littérature, dira l'universitaire, Saramogo avait choisi de mettre à l'honneur son grand-père en déclarant qu'il était «l'homme le plus sage que je connaisse», ajoutant que «cet homme qui ne savait ni lire, ni écrire avait des ancêtres berbères venus d'Afrique du Nord». Selon M. Reis, cette affirmation identitaire «était une façon, pour Saramago, de s'éloigner du Nord et de l'Europe pour se rapprocher des peuples avec qui il se sentait des affinités». Sa célébrité de romancier, Saramago la mettra au service des causes dont il était convaincu de la justesse et se retrouvera, de ce fait, aussi bien aux côtés des altermondialistes pour fustiger «le libéralisme économique sauvage», qu'à Ramallah (Palestine), en 2002, aux côtés des assiégés. Ces positions de principe mettront souvent l'écrivain en désaccord avec les intellectuels portugais, mais jusqu'au bout, conclura l'orateur qui a côtoyé l'écrivain, cet homme «est resté fidèle à ses idées».