Résumé de la 101e partie n Manolete est maintenant un toréador célèbre. Il a vite imposé son style et le public l'idolâtre. Il est célèbre et riche. partout où il va, il soulève l'enthousiasme des foules. Mais il a toujours gardé sa réserve et surtout son regard triste. Il faut dire que la misère l'a marqué de son sceau indélébile et que le jeune homme le plus célèbre et le plus adulé de l'Espagne n'oublie pas les dures années de son enfance ! Les mois passent et son prestige ne cesse d'augmenter. Le public, tout en l'admirant, commence à se faire versatile. Manolete est, il n'y a pas de doute, le meilleur torero de tous les temps, mais la moindre erreur qu'il fait est sévèrement critiquée. Des ennemis, tapis dans l'ombre, des hommes jaloux de sa réussite, prennent la parole, notamment dans la presse et la radio. Et on commence à entendre les reproches habituels adressés aux artistes, aux vedettes qui atteignent la gloire : — Il ne travaille que pour l'argent ! — On ne lui donne à combattre que les bêtes faibles ! C'est naturel qu'il triomphe toujours ! Mais le plus grand reproche, celui qui lui fait le plus mal, c'est celui-là : — il barre la route aux jeunes toreros ! Il veut être le seul à figurer dans les affiches, à triompher ! Il est clair qu'on cherche à le dénigrer, pour pouvoir l'évincer et le remplacer par d'autres, qu'on veut propulser sur la scène, pour des raisons d'intérêt. Des gens sont même payés pour le siffler quand il se produit. Pour répondre à ses détracteurs, Manolete redouble d'efforts. Il démontre qu'il est bien le meilleur, que sa tauromachie est un art d'une grande pureté et qu'il fait tout pour faire plaisir à son public ! Et il torée magnifiquement, multipliant les prouesses. Le public retient son souffle, à chacun de ses coups. Même ceux qui sont là pour le siffler se taisent, surpris par la beauté des coups et ce n'est qu'une fois que la foule explose qu'ils se rappellent leur rôle et qu'ils se mettent à crier ou à siffler. Le 28 août 1947, Manolete s'apprête à combattre pour la dernière fois de sa courte vie. Il entre dans l'arène, revêtu de l'habit de lumière. On fait aussi entrer le taureau, une bête furieuse du nom de Islero. L'homme et la bête s'affrontent d'abord du regard puis le taureau se précipite. Dans le publique on crie : «Olé !» Manolete peut lui porter l'estocade, mais il ne le fait pas pour prolonger le plaisir du public. Il finit par enfoncer l'épée dans le garrot de la bête mais celle-ci, dans un ultime mouvement de défense, le frappe et l'encorne. «Oh !» crie le public. L'homme et la bête s'écroulent presque ensemble. La foule crie. On emporte Manolete qui a le temps, avant de mourir, de demander si la foule lui a accordé, en signe de victoire, les oreilles et la queue du taureau. L'Espagne tout entière a pleuré le jeune torero, sans doute le plus grand de tous les temps ! (A suivre...)