Résumé de la 55e partie n Pour Miss Howard cet interrogatoire n'est que bavardage et perte de temps... Papotages! papotages! quand nous savons tous très bien que... Le coroner l'interrompit brusquement. — Merci, mademoiselle Howard. C'est tout. J'ai l'idée qu'il poussa un soupir de soulagement lorsqu'elle lui obéit et se retira. Ce fut alors qu'eut lieu le coup de théâtre de la journée. Le coroner appela Albert Mace, le préparateur en pharmacie, qui n'était autre que notre jeune homme agité au visage pâle. Répondant aux questions du coroner il déclara avoir son titre de pharmacien, mais qu'il ne travaillait que depuis peu de temps dans cette pharmacie particulière, où il remplaçait le préparateur habituel qui venait d'être appelé aux armées. Ces préliminaires terminés, le coroner alla droit au but. — Monsieur Mace, avez-vous récemment vendu de la strychnine à une personne non autorisée à en acheter ? — Oui, monsieur. — Quand cela ? — Lundi dernier, dans la soirée. — Lundi ? Pas mardi ? — Non, monsieur. Lundi, le 17 juillet. — Veuillez nous dire à qui ? On eût pu entendre tomber une épingle. Certainement, monsieur. C'est à Mr Inglethorp. Tous les regards se tournèrent instantanément vers l'endroit où Alfred Inglethorp était assis, impassible et flegmatique. Pourtant, il tressaillit légèrement lorsque ces mots tombèrent des lèvres du jeune homme. Je crus même qu'il allait se lever, mais il demeura assis, bien que son visage trahît une stupeur fort bien simulée. — Vous êtes sûr de ce que vous dites ? demanda le coroner sévèrement. — Tout à fait sûr, monsieur. — Avez-vous l'habitude de vendre de la strychnine ainsi à tout venant ? Le malheureux jeune homme frémit sous l'œil courroucé du coroner. — Oh ! non, monsieur ! Jamais ! Mais, comme il s'agissait de Mr Inglethorp, au Court, je n'y ai pas vu de mal. Il m'a dit que c'était pour empoisonner un chien. En mon for intérieur, je sympathisai avec lui. C'était très humain d'essayer de plaire au Court, surtout quand pareille complaisance pouvait assurer la clientèle du Court à la pharmacie locale. — N'est-il pas d'usage que toute personne achetant du poison signe un registre ? — Oui, monsieur. C'est ce qu'a fait Mr Inglethorp. — Avez-vous apporté ce registre ? — Oui, monsieur. Le registre fut produit, et après quelques mots de blâme sévère, le coroner congédia le malheureux jeune homme. Alors Alfred Inglethorp fut appelé au milieu d'un silence angoissé. Je me demandais s'il se rendait compte à quel point la corde se resserrait autour de son cou. (A suivre...)