Décadence n Le cimetière d'El-Alia est en péril. Son foncier a été dilapidé par la mafia du foncier, sa superficie a «rétréci» de 50 hectares. Ce cimetière, qui a été acquis dans le cadre d'une transaction en date du 1er février 1941 entre la ville d'Alger et le domaine El-Alia sur la base d'un acte notarié établi le 21 avril 1941 sous le numéro 21/19, fait face ces deux dernières années à une multitude d'aléas dont l'homme est à l'origine. Le constat est effarent, les travailleurs, eux, parlent d'une gestion «approximative» de ce lieu sacré, «pour ne pas dire une non-gestion», nous disent d'emblée plusieurs travailleurs de ce cimetière qui assistent impuissants à la décadence. Nous préférons nous attarder sur l'essentiel, celui de certaines pierres tombales saccagées, des fosses septiques non identifiées à la suite de la délocalisation des bidonvilles qui occupaient un espace de ce cimetière, des troupeaux de bêtes qui voient en ce cimetière, un endroit tout trouvé pour paître. Plus grave encore, des voyantes, amatrices de sorcellerie, exercent leur «métier» en ce lieu, des consommateurs de psychotropes se donnent rendez-vous sur les bordures des tombes... Des constructions s'élèvent dans le périmètre du cimetière en contradiction avec l'article 3 de l'ordonnance 75/79 du 15 décembre 1975 qui interdit toute construction au sein des cimetières et leurs alentours sur une distance de 30 mètres. «J'ai un arrêté d'attribution délivré par l'APC. Je suis donc en règle», nous dit un «propriétaire». Au niveau aussi bien de cette municipalité et de l'entreprise chargée de la gestion des cimetières, c'est le silence radio, personne ne peut éclairer notre lanterne sur le sujet de la dilapidation du foncier et des immondices qui traînent à l'intérieur de ce lieu sacré. Justement, l'absence de civisme de certains citoyens se conjugue à la carence en matière d'entretien. Et comme le malheur des morts se conjugue au pluriel, des herbes sauvages envahissent plusieurs espaces du plus prestigieux cimetière d'Algérie. En ce vendredi, chacun des citoyens interrogés manifeste sa rage à l'égard de ceux-là mêmes qui, par des actes immoraux et traumatisants, s'acharnent sur ce cimetière de plus de 300 000 tombes. «C'est incroyable ce que nous voyons ces dernières années. Nous voyons, de jour comme de nuit, une véritable atteinte à la mémoire de nos morts. Des carrés non entretenus, des gravats, et des millions de bouteilles en plastique traînent le long des allées de ce cimetière sous le regard de tous. Cet état des lieux qui a été banni des années durant refait surface», clament plusieurs citoyens révoltés. «L'entreprise de gestion des cimetières d'Alger qui doit entretenir les cimetières est totalement absente. Nous avons fait des démarches pour organiser des volontariats à l'intérieur des cimetières, en vain», rapportent plusieurs citoyens de la cité Makoudi, limitrophe du cimetière. Selon l'un de nos interlocuteurs, «les moyens matériels et humains existent pour une opération de grande envergure en vue de donner un «coup» de neuf à ce cimetière. Il ne manque que la volonté de l'homme». Effectivement, ce n'est qu'à partir de ce moment-là que nous pourrons dire à nos morts : «Reposez en paix». Néanmoins, il faudrait retenir que cette décadence a refait surface ces derniers temps. Or, l'établissement en charge de la gestion des cimetières de la wilaya d'Alger avait pratiquement éradiqué ces fléaux. Elle avait également tracé un programme ambitieux d'entretien, de préservation, d'aménagement et de réhabilitation, avec le concours de l'administration d'Addou Mohamed Kébir, wali d'Alger.