L'Etat engagé à soutenir et accompagner les opérateurs économiques dans le secteur de l'industrie pharmaceutique    Ligue 2 amateur: sprint final pour l'accession à l'Est, l'ES Ben Aknoun pour accentuer son avance à l'Ouest    ANP: reddition d'un terroriste et arrestation de 9 éléments de soutien aux groupes terroristes en une semaine    Mansouri rencontre à Pretoria la vice-ministre sud-africaine des Relations internationales et de la Coopération    En sa qualité d'envoyé spécial du président de la République, Attaf en visite officielle en Tunisie    L'Algérie regrette la confirmation de la position américaine sur le conflit au Sahara occidental    Situation humanitaire difficile des populations à Ghaza: le Secrétaire général de l'APN s'entretient avec la représentante de l'UNRWA en Europe    Sonatrach: Hachichi tient en Italie une série de rencontres avec de hauts responsables d'entreprises énergétiques mondiales    Signature d'un protocole d'accord entre les ministères de l'environnement et de l'éducation pour l'aménagement de 2500 clubs environnementaux éducatifs    Chaib reçoit une délégation du groupe médiatique CNN international    Quand certains intellectuels algériens versent dans le zemmourisme à l'insu de leur plein gré    L'Algérie appelle le Conseil de sécurité à plus de fermeté    L'Algérie n'ira pas à Canossa !    Création «prochaine» de délégations de wilayas de la société civile    La CAN menacée ?    Le CSC face à l'USMA pour un exploit    Un défi pour le développement et la sécurité de l'Afrique    Une révolution technologique en marche    «Pigeon voyageur» dans l'histoire du cinéma algérien    La Cinémathèque Afrique de l'Institut français organise les «African Cinema Days» 2025 à Paris    Journée parlementaire: le haut niveau de professionnalisme de l'ANP mis en exergue    Le Venezuela invité d'honneur de la 14e édition du Festival culturel international de la musique symphonique    Le président de la République reçoit le chercheur et scientifique algérien Karim Zaghib    Professionnalisation du football: la Fifa organise un séminaire les 9 et 10 avril à Alger    L'Algérien Khaled Ouennouf intègre le Bureau Exécutif de l'Union arabe de judo    Hadj 2025: des centres de formation mobilisés au profit des hadjis    Renforcer la communication entre l'ONSC et la société civile pour promouvoir l'action participative    Fournir les meilleurs services technologiques aux citoyens    Les chauffeurs des autobus de voyageurs reviennent à la charge !    Concours des meilleurs travaux scolaires "L'Algérie et les causes justes": installation du jury    Oran: un colloque sur les travaux de l'historien algérien défunt Omar Carlier    La menace de la cocaïne gagne du terrain !    Boughali rencontre son homologue bahreïni    Le CRB à quatre points du MCA le leader    Monstre sacré du cinéma algérien    Saisie de deux kilos de kif et de cocaïne        L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



Histoires vraies
Il causait à son balai
Publié dans Info Soir le 22 - 09 - 2011

Les deux petits hommes marchent sur la route, l'un derrière l'autre. Devant, Francisco Berguez, balayeur de son état. Derrière, Benito Pascual, balayeur de son état. Ils portent le même costume gris sale et la même casquette, généreusement offerts par la ville de Lerida en Espagne. Pour leurs bons et loyaux services, la même ville leur octroie 70 pesetas de salaire par semaine et un balai chacun.
Aujourd'hui, 4 juillet 1953, Francisco et Benito ne traînent pas leurs balais. Ils sont en voyage.
Francisco, maigre, grand nez et petit front, s'assoit au bord de la route. Il a chaud, et il fait de l'air avec sa casquette. Derrière lui, à quelques pas, Benito s'est immobilisé, la bouche sèche. Il regarde fixement deux choses : le crâne de son compagnon, un crâne aux cheveux rares, enduits de gomina, et une énorme pierre juste derrière ce crâne, posée là, à portée de main.
II n'y a qu'à prendre la pierre, il n'y a qu'à la soulever bien haut, et frapper fort avec un grand élan du corps et un cri :
«Tu meurs, Francisco ! Meurs... Que Dieu te garde !»
C'est fait. Benito n'en revient pas, il a pensé et tué en même temps. Le soleil joue avec la poussière de la route. Le sang et la gomina font un curieux mélange. Le long nez de Francisco Berguez s'est écrasé dans la poussière et Benito fouille les poches du cadavre avec rapidité.
2 300 pesetas.
Le voleur, le criminel s'enfuit avec 2 300 pesetas. A-t-il tué pour ça ? Non.
Deux jours plus tard, dans le bureau d'un commissaire de police, à Lerida, Benito crie, supplie et se met à genoux :
«Non, ce n'est pas pour l'argent, non ! C'était mon copain !»
Mais le policier ne le croit pas. Peut-on croire un balayeur ? Un balayeur a-t-il d'autres sentiments, d'autres mobiles pour tuer, que les économies de son camarade ? Sûrement pas. Il a tué, il a pris les 2 300 pesetas et il a fui sur la route comme un fou. Les carabiniers l'ont arrêté au premier village, alors qu'il se taise, l'immonde, qu'il aille croupir en prison jusqu'au moment d'affronter les juges. Il aura droit au garrot. Le bourreau l'étranglera, comme le veut la loi. C'est tout.
Dans sa prison, Benito Pascual prie à genoux devant une croix qu'il a dessinée sur le mur de la cellule. Ses trois compagnons, assassins et voleurs chevronnés, ricanent.
«Hé, si tu crois que le Bon Dieu existe, pourquoi tu ne lui demandes pas de scier les barreaux ?»
Il pleure, Benito, de vraies larmes, il a mal aux genoux, à force de prier, mal à la tête à force de répondre :
«Je l'ai tué parce que c'était mon copain.»
Devant le juge, c'est la même rengaine :
«Je l'aimais, mon copain, je l'aimais. Ça fait dix ans qu'on balayait ensemble. Lui, il faisait le tour de la cathédrale et moi je faisais la place autour de la fontaine. A midi au soleil, on mangeait tous les deux à l'ombre de l'église.
— Mais tu l'as tué ! Tu lui as enfoncé le crâne à coups de pierre, et tu l'as achevé, pourquoi ? Pour lui prendre son argent, Benito, c'est tout. D'où venait cet argent ?
— C'étaient ses économies. Il avait gardé presque toute sa paie depuis un an.»
Benito se redresse sur la chaise de bois, il secoue ses menottes, et frappe sur le bureau du juge :
«C'est ma faute ! Mais je jure devant Dieu qui me regarde, que je ne voulais pas l'argent.»
Un carabinier l'oblige à se rasseoir brutalement et l'injurie :
«Tais-toi, tu dois le respect à M. le juge,
chien ! Vermine ! Assassin !»
Alors Benito se remet à pleurer. Comment faire comprendre à cet homme instruit qui doit le punir que lui, Benito, a les idées qui s'embrouillent dans le crâne.
A suivre
Pierre Bellemare


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.