Vision - L'exposition offre des instantanés, des regards divers, des vécus objectivement rapportés ou immortalisés, des sensibilités partagées et des imaginaires. L'exposition, qui s'étale jusqu'au mois de novembre, est initiée dans le cadre de la 2e édition du Festival national de la photographie d'art. Elle rassemble des photographies en noir et blanc ou en couleurs, que ce soit des photos événements ou d'art. Toutes convergent vers un même point : dire ce qui est perçu, vécu ou ressenti. L'exposition, qui est visible au Musée d'art moderne, associe des photographes de presse aux plasticiens photographes. Par ailleurs, le Bastion 23 abrite des projections vidéo réalisées par de jeunes passionnés. Baghdadi Souhil, du quotidien El Watan, suit, d'une photographie à l'autre, un jeune Syrien vivant au Danemark dans son quotidien. Il raconte en images, qui parlent d'elles-mêmes, le racisme et le mal de vivre de ce dernier. Il a suivi à la trace ce jeune émigré syrien au Danemark pour une meilleure vie. Un périple qui témoigne des raisons des jeunes de quitter leur pays et la stabilité familiale. C'est un témoignage fort poignant et bien démonstratif. Abdelhamid Aouragh est un photographe de presse au quotidien El Khabar. «Chroniques oranaises» est la thématique de sa collection présentée au musée. Il s'agit de thèmes sociaux. Il s'emploie à rendre par l'image la réalité de sa ville, Oran. Il nous livre un regard croisé des réalités de la rue et des hommes qu'il côtoie chaque jour et celui du destin auquel ils sont soumis. Pour sa part, Benyoucef Cherif, correspondant de l'agence Gamma, expose une série de photographies montrant des pèlerins aux Lieux Saints de l'Islam. Elle a pour titre «Fenêtre sur La Mecque». «C'est un travail que j'ai réalisé à La Mecque», explique-t-il, et d'ajouter : «Dans mon travail, j'aborde la question, voire la problématique de la représentation des visages dans l'Islam. C'est de savoir comment l'image est perçue. Et pour cela, il fallait aller au cœur de l'Islam, d'où mon voyage à La Mecque. J'ai entrepris ce voyage de Omra à La Mecque avec mon père, en tant que musulman et simple individu.» Le reporter tient à souligner que les prises de vue ont été réalisées à l'insu des protagonistes, femmes ou hommes. «Tout cela s'est fait d'une façon fluide, furtive, sans que personne se rende compte que j'étais en train de prendre des photos», confie-t-il. Le photographe avoue avoir trouvé le courage d'oser le geste interdit : photographier sans autorisation. Se sont associés aux photographes de presse, des photographes plasticiens. L'objectif consistait à montrer une autre manière de faire de la photo, de quelle autre façon peut-on l'appréhender, qui n'est autre qu'artistique. Abderrahman Ouattou effectue des prises de vue, les retravaille sur un plan plastique, c'est-à-dire pictural en vue de donner à l'image travaillée une portée poétique dans chacune des photographies qu'il crée, car il s'agit-là d'une création, il projette instantanément des silhouettes féminines. Il s'applique avec beaucoup d'affection, avec quelque soupçon d'érotisme à reproduire l'image de la femme, son visage, son corps. Tout cela ressemble à une obsession fantasmatique. S'exprimant sur cette performance, le directeur du Musée d'art moderne Djehiche, qui estime que la photographie appartient à toutes les générations, dira : «Ce festival est devenu une tradition en raison de l'engouement et du rush du public par rapport aux expositions de peinture.» Et d'estimer : «Le langage photographique est compréhensible par rapport à la peinture.» Djehiche, pour qui cette édition tient à rendre hommage à la photo de presse, car, dit-il, «il y a banalisation de ce genre de photo, aussi l'important est de la mettre en valeur, de la montrer ailleurs que dans les journaux», explique que «s'il y a tant d'engouement de la part des jeunes pour la photo, c'est parce que la pratique de celle-ci est devenue accessible à tous, notamment avec la vulgarisation et l'essor des nouvelles technologies». Il a, en outre, fait savoir que «la nouveauté de ce festival réside dans les deux espaces consacrés aux expositions pour trois expressions, notamment la photo de presse et la photo d'art ainsi que la vidéo». «Le travail des vidéastes est plus intimiste et plus introverti», explique ce responsable, qui poursuit : «Nous avons voulu vulgariser cette forme d'expression artistique, offrir aux artistes la possibilité de montrer leur travail. Nous avons voulu, par là, dynamiser la création dans ce sens.» Quant à la question de savoir pourquoi avoir associé des photographes de presse à celles de l'art, Djehiche répondra : «Notre souci est d'opposer le journaliste à l'artiste. L'un agit instantanément sur le moment, alors que l'autre prend le temps qu'il faut pour faire ses prises de vue. C'est aussi pour donner une autre vision de la photographie, deux approches différentes. Même les photographes plasticiens saisissent l'instant, s'emparent de l'actualité, décrivent l'événement comme les photographes-reporters, mais en ayant une approche artistique.»