Xénophobie - Les militants du parti néonazi, sèment la terreur parmi des étrangers en toute impunité. Dans certains quartiers souvent aux murs tagués de symboles nazis, comme dans d'autres zones défavorisées d'Athènes où s'entassent des sans-papiers en transit vers l'Europe, les «milices» noyautées par Chryssi Avghi (Aube dorée) imposent leur loi. Au soir du scrutin du 6 mai, marqué par une entrée fracassante au parlement de l'Aube dorée avec 6,9% des voix et 21 députés, le chef de la mouvance avait lancé d'un ton glacial : «Le temps de la peur a sonné.» Depuis, et à l'approche de nouvelles législatives le 17 juin prochain, ses membres se sont faits plutôt discrets dans ce quartier où ils sévissaient auparavant. «Les gens qui nous insultent et nous crient de rentrer chez nous, on les voit moins ces temps-ci, ça s'est calmé un peu», raconte Moustapha, Nigérien de 28 ans. A Patras, principal port grec vers l'Italie où nombre d'immigrés coincés en Grèce tentent de partir, environ 300 membres du parti, cagoulés, casqués, armés de barres de fer et d'engins explosifs artisanaux ont en décousu avant-hier mardi avec la police lors d'une manifestation anti-migrants. Dans un pays asphyxié par deux ans d'austérité, l'immigration a concurrencé le thème de l'économie lors de la campagne électorale d'avril. Considérée comme l'une des deux principales porte d'entrée dans l'UE, la Grèce a enregistré plus de 55 000 arrestations de migrants en 2011 dans la région frontalière avec la Turquie, selon la police Frontex, et 12 000 depuis début 2012. Pour le nombre de migrants légaux, les estimations officielles grecques varient de 784 000 à 970 000. Les migrants irréguliers étaient eux 470 000 en 2010, selon les dernières données policières. L'arrivée de Chryssi Avghi dans l'arène démocratique est un «choc pour le pays», assure la chargée d'information pour l'agence onusienne pour les réfugiés (UNHCR). «Mais le phénomène n'est pas arrivé du jour au lendemain : la crise économique, la présence illégale de migrants, l'absence de prise en charge et de structures d'accueil ont créé de grandes frustrations et constitué un terreau pour la xénophobie», rappelle-t-elle. «La menace reste là et la situation empire : les membres de Chryssi Avghi se sentent plus puissants désormais et acceptés par la population», commente pour sa part le président de Médecins du Monde Grèce (MDM). «Ils promettent aux Grecs des avancées sur le plan social. Ils veulent imposer un agenda de la peur, et quasiment tous les partis jouent leur jeu», déplore-t-il. Il rapporte un nombre constant de passages à tabac, la «peur» de ces étrangers livrés à eux-mêmes et celle des employés, «menacés» ou «intimidés» dans les locaux même de cette Ong. «Un pakistanais est arrivé hier la tête enflée, l'œil ecchymosé après avoir été frappé la semaine précédente dans la rue. Il n'est pas venu se faire soigner avant parce qu'il avait peur», témoigne un autre médecin. Comme nombre d'étrangers interrogés, Kamal quadragénaire algérien, ne veut plus sortir le soir, «c'est trop dangereux». Ce diabétique aux traits émaciés dit avoir été battu à deux reprises par des «hommes en noir» et par la police. «Si les fascistes gagnent encore, on est mort», craint pour sa part un Iranien hébergé dans ce centre de MDM.