Plaidoyer n La création de structures d'écoute et de sensibilisation à travers l'ensemble du territoire national pourrait constituer une première action de prévention contre le suicide. La viabilité de ce dispositif, s'il venait à être adopté, dépendrait d'une part de la qualification des moyens humains mis en place et, d'autre part, de la disponibilité des bénéficiaires à se prêter à ce genre d'action. Ces centres auront à jouer «un rôle important dans la prévention du suicide en Algérie», a indiqué le Dr Sbaïhi du Centre hospitalo-universitaire de Béjaïa. Pour lui, la prévention ne peut en aucun cas se limiter ou passer exclusivement par la suppression «des produits et objets utilisés à des fins suicidaires». Cette manière d'agir «ne semble pas constituer un moyen efficace pour lutter contre le phénomène», ajoute-t-elle avant de revenir sur l'utilité des structures d'écoute dans la sensibilisation du public des mineurs aussi bien dans les écoles que dans les Centres de formation professionnelle. Ces espaces devraient également faire office de centres de prévention au profit des enfants qui sont déjà passés à l'acte. «La création d'un centre de prévention du suicide serait utile pour mieux prendre en charge le suicidant», poursuit la spécialiste qui plaide pour le renforcement de la formation des praticiens. Ces derniers sont les premiers à être en contact direct avec les familles des postulants à l'auto-homicide volontaire. Désemparées, ces familles sont généralement désarmées face à l'attitude incompréhensible de leurs enfants d'où l'importance de leur accompagnement et «la facilitation de l'accès aux soins psychiatriques», estime le Dr Sbaïhi qui n'hésite pas dans ce sillage à soulever le problème des services psychiatriques à travers le pays. «L'encombrement des services psychiatriques de réanimation réduit la durée d'hospitalisation et de prise en charge des personnes ayant fait une tentative de suicide», regrette-t-elle. Pour répondre à cette demande de plus en plus importante, la direction de santé de la wilaya de Tizi Ouzou a pris récemment l'initiative de mettre en place un réseau de prise en charge de la santé mentale chez l'enfant. Ce réseau comprend outre des spécialistes de la santé mentale, des imams et des représentants de la direction de l'Education. Il aura pour mission de détecter les enfants présentant des troubles mentaux (isolement, irritabilité, violence) en vue de les orienter vers les établissements hospitaliers adaptés. Le réseau est aussi appelé à sensibiliser les parents pour qu'ils puissent reconnaître les signes annonciateurs d'un trouble mental chez leurs enfants et, de ce fait, éviter des «complications graves pouvant aboutir au suicide de l'enfant», a indiqué le Dr Bouslimane, cadre à la direction de la santé, de la population et de la réforme hospitalière. C'est une première à l'échelle nationale, estime le Dr Bouslimane précisant que ce réseau travaillera en étroite collaboration avec les 40 Unités de soins (UDS) existant au niveau des établissements scolaires. Les enfants présentant une pathologie mentale seront ainsi orientés vers l'Etablissement hospitalier spécialisé (EHS) en psychiatrie de Oued Aïssi. L'efficacité de ce réseau a pu se vérifier récemment avec une prise en charge appropriée dont a bénéficié un collégien de la localité de Makouda ayant fait une tentative de suicide. A. B.