Résumé de la 65e partie - Un conseil de famille se tient dans le salon, Sophia invite Charles à y assister... Ils étaient tous là. Philip, carré dans un grand fauteuil rouge placé entre les deux fenêtres, faisait songer à un juge sur le point de prononcer son verdict. Son beau visage était d'une impassibilité glaciale. Roger était assis de guingois sur un gros pouf, à côté de la cheminée, la chevelure ébouriffée et la cravate de travers. Malgré cela, il paraissait très en forme. Clemency était derrière lui, sa mince silhouette perdue dans un immense fauteuil. Elle semblait lointaine, indifférente à ce qui pouvait se dire autour d'elle. Edith occupait le siège du grand-père. Le buste très droit, les lèvres serrées, elle tricotait avec une incroyable énergie. Quant à Magda et Eustace, ils avaient l'air d'une toile de Gainsborough. Installés côte à côte sur le canapé, ils étaient magnifiques, lui très élégant, avec l'expression de résignation polie d'un gentleman qui s'ennuie avec distinction, elle très duchesse de «Three Gables» dans sa robe de taffetas. Philip, m'apercevant, fronça le sourcil. — Sophia, dit-il, nous sommes en train de discuter des affaires de famille, de caractère essentiellement privé. J'allais battre en retraite, avec une phrase d'excuses, mais Sophia riposta d'une voix très assurée : — Charles et moi, nous espérons nous marier. Je tiens à ce qu'il assiste à la conversation. — Et pourquoi pas ? s'écria Roger avec feu. Je me tue à te répéter, Philip, qu'il n'y a rien de confidentiel dans tout ça ! Demain ou après-demain, le monde entier sera au courant. Quittant son pouf, il était venu à moi. Me posant la main sur l'épaule, il ajouta, cordial : — Au surplus, mon cher garçon, vous savez tout, puisque vous étiez présent à l'entretien de ce matin ! — Comment ? dit Philip. Presque aussitôt, il comprit. — Ah ! oui, votre père... Je me rendais fort bien compte qu'on eût souhaité me voir ailleurs, mais Sophia me tenait fermement par le coude et je ne refusai pas la chaise que Clemency m'indiquait du geste. Miss de Haviland, cependant, reprenait la discussion au point où elle avait été interrompue. — Vous direz ce que vous voudrez, je persiste à croire, quant à moi, que nous devons respecter les volontés dont nous ne pouvons contester qu'elles étaient celles d'Aristide. Pour ma part, dès que nous en aurons fini avec cette histoire, je mets tout ce que je posséderai à la disposition de Roger ! Roger fourrageait dans ses cheveux avec rage. — Non, tante Edith, non ! — Pour moi, dit Philip, j'aimerais faire de même, mais j'ai à tenir compte de certaines considérations qui... Roger ne le laissa pas finir. — Mais, mon vieux Philip, tu ne comprends donc pas que je ne veux pas recevoir un sou de personne ? — Il ne peut pas ! ajouta Clemency. (A suivre ...)