Evocation - Après Tizi Ouzou et Oran, «Café Barbès», un spectacle musical, a atterri, hier, à Alger et ce, à l'initiative de l'Agence algérienne du rayonnement culturel (Aarc). C'est à la salle Ibn Zeydoun que le public a été convié à voyager à travers l'histoire de l'émigration maghrébine en France. L'univers musical auquel le public – venu en grand nombre apprécier les adaptations de chansons célèbres de l'exil, revisitées dans un véritable show de deux heures où se sont mêlés théâtre, music-hall et montage vidéo – a été invité est chargé de réminiscences et de nostalgie. En effet, le voyage proposé nous transporte à l'époque de la première moitié du XXe siècle en France, dans le sillage des mouvements migratoires entraînés par la colonisation avec des chantres tels que Aït Farida, Slimane Azem, Dahmane El-Harrachi, Cheikh El-Hasnaoui, Bahia Farah, Kamel Hamadi... Le spectacle évolue dans une scénographie rappelant ces années-là : la scène est imaginée dans un décor reconstituant l'intérieur d'un bistrot typiquement parisien. L'on assiste à une mise en scène mêlant jeu musical et théâtral. Le show, un music-hall, raconte l'histoire de Lucette, la tenancière de l'établissement «Barbès Café». Celle-ci confie à Salah son histoire d'amour avec Mouloud, un émigré algérien en proie, à l'instar de bon nombre de ses compatriotes, aux affres de l'exil et «douloureusement» plongé dans une profonde amertume, celle du mal du pays. Pour retrouver l'ambiance de son pays, Mouloud se rend au «Café Barbès» devenu le centre social et le refuge des émigrés. Il noie son chagrin certes dans la boisson, mais aussi dans la musique dans laquelle se sont illustrés des chanteurs tels que Slimane Azem, Cheikh El-Hasnaoui ou encore Dahmane El-Harrachi et bien d'autres encore. C'est ainsi que dix musiciens et chanteurs, tels Brahmia et Hafid Djemaï, ont évolué tout au long du spectacle, pour interpréter les meilleures chansons (‘Li rah ou wella' (Celui qui est parti et revenu), ‘Ay Adjrad' (Les sauterelles) ou ‘Maison Blanche'...), celles qui ont marqué l'histoire de l'émigration algérienne en France, des succès restés gravés à ce jour dans la mémoire collective. Le spectacle se poursuit avec l'évocation de l'indépendance de l'Algérie, ce moment historique immortalisé par la mémorable chanson de Hadj M'hamed El-Anka, à savoir ‘El hamdoullilah mabkach el istîmar fi bladna'. Une chanson devenue d'ailleurs un hymne du cinquantenaire de l'indépendance. Le show se poursuit aussi avec d'autres chansons, celles du groupe Zebda, Akli d, Rachid Taha...) et qui, par leur implication dans la vie sociale et culturelle, ont apporté leur touche à cette France qui, désormais, est devenu un pays multiculturel. Le spectacle s'est caractérisé par une belle originalité, notamment dans le rythme et la force des chansons interprétées. Notons qu'une seconde représentation de «Barbès Café» est prévue, ce soir, à la même heure et dans le même lieu. - «Café Barbès» est l'idée d'Ameziane Azaïche, manager culturel parisien, qui œuvre à la promotion de spectacles maghrébins et notamment algériens, avec la complicité de Mohammed Ali Allalou et Aziz Smati, anciens de la Radio algérienne, et, respectivement, coordinateur et créateur vidéo dans ce spectacle. Azaïche a assuré l'écriture du spectacle en collaboration avec Naïma Yahi, historienne et spécialisée sur les questions de l'émigration. La mise en scène a été confiée à Géraldine Benichou. Selon les organisateurs, «les objectifs de ce projet sont pluriels : recueillir et valoriser la parole et la mémoire des anciens qui ont vécu cette émigration, expliquer aux jeunes générations l'histoire de l'émigration algérienne et le contexte dans lequel elle s'est déroulée, utiliser les thèmes du spectacle pour instaurer un dialogue entre les générations autour de la mémoire, la comparaison des expériences et la diversité culturelle, nous souhaitons également nous appuyer sur ce travail d'échanges et de discussion pour faciliter l'accès à la culture pour les personnes qui y sont peu familières.»