Résumé de la 3e partie - Bien que soutenu par sa femme, Frédéric, désespéré, ne pense qu'au suicide... Vous ne comprenez pas. C'était à moi de réussir. C'était moi qui devais surmonter la situation. Sinon ma vie, mon existence, ce mariage, ces enfants, tout cela ne voulait rien dire, ou plutôt si, si je n'y arrivais pas, c'est que j'avais eu raison de vouloir mourir avant. Je me suis mis à penser que j'avais trahi ma promesse en me ratant, trahi mon père en ne réussissant pas, trahi ma femme en l'épousant, et mes enfants en les laissant venir au monde. Il fallait que je prenne à nouveau la décision. — La même que votre père ? C'est ça ? — Il n'y avait rien d'autre à faire. — Vous n'avez jamais pensé que vous pouviez mourir seul ? Qu'il n'était pas nécessaire d'entraîner les autres dans la mort ? — Je devais faire un néant de ma vie, et ma vie c'était la leur. — Ceci est faux. Chaque être humain a une vie propre. Votre père ne vous a pas tué, lui ! — Il a tué ma mère, sa femme. — Et c'est un crime. En se suicidant, il n'a fait qu'échapper à la punition de ce crime. Vous n'y échapperez pas. Car vous, vous êtes vivant, et le tribunal va juger vos crimes. Êtes-vous conscient d'avoir assassiné votre femme et votre fils ? — Je suis conscient de mes actes, si c'est cela que vous voulez entendre. Et je voulais mourir aussi. J'ai raté ma mort encore une fois, ce n'est pas ma faute. — Réfléchissez à cette question, monsieur Jakubitchek. Et si vous vous étiez raté volontairement ? — Ce que vous dites est odieux. J'ai voulu mourir. J'ai tué ma femme et mon fils, en les prévenant de ce que j'allais faire ensuite. J'ai fait ce qu'avait fait mon père, je me suis tiré une balle dans la tête. Ils savaient que je le ferais, ma femme ne s'est pas débattue, mon fils non plus, ils ont compris, je le jure. — Votre fille vous a échappé ? Ou bien aviez-vous décidé de l'épargner et pourquoi ? — Elle a eu peur. Elle n'a que dix ans. Mon fils avait douze ans, c'était presque un homme, déjà. — Comme vous au moment où votre père s'est suicidé. Vous étiez un homme à onze ans ? Vous n'aviez pas peur ? — J'aurais préféré mourir avec mon père, à ce moment-là. Il aurait dû. Moi je l'ai fait, il valait mieux. Je ne voulais pas pour mon fils le même destin que le mien, la même vie noire. — Avez vous encore des idées de suicide ? — Je trouverai le courage de le faire. Personne ne m'empêchera d'y arriver, cette fois.» Frédéric Jakubitchek a été condamné à douze ans de prison pour le meurtre de sa femme et de son fils. Sa petite fille Frederika, âgée de dix ans, s'était enfuie dans le jardin le jour du drame. Elle a tout vu, jusqu'au moment où son père a retourné l'arme sur lui. La balle du revolver ne l'a pas tué. Défiguré seulement, en n'atteignant que la partie superficielle du front et l'œil droit. Voyant son père inondé de sang, sur un fauteuil du salon, l'enfant a eu le sang-froid de faire un pansement à l'aide d'une bande de gaze qu'elle a elle-même placée sur la blessure, avant d'aller prévenir les voisins. Un témoin a rapporté ce détail étonnant : «Lorsque le père a repris ses esprits, il a arraché le pansement avec violence, et l'enfant s'est écriée : «Mais papa, tu vas mettre du sang ‘'partout sur le fauteuil !''» Frederika Jakubitchek était peut-être la seule capable de survivre, après tout.