Les essais de la discorde Déclenchement n Depuis l'essai nucléaire nord-coréen, la tension n'a cessé de grimper sur la péninsule, entre provocations de Pyongyang et réponses musclées de Washington et Séoul, laissant craindre une déflagration que le monde veut croire improbable. Tout remonte aux essais balistique et nucléaire conduits respectivement le 12 décembre et le 12 février par la Corée du Nord. En réaction, le Conseil de sécurité de l'ONU adopte le 7 mars à l'unanimité, de nouvelles sanctions contre ce pays. Dans les jours qui ont précédé ce vote, le régime stalinien a multiplié les mises en garde, menaçant Séoul de rompre l'armistice de 1953 et Washington d'une «guerre thermonucléaire». Depuis, la «rhétorique belliqueuse» de Pyongyang dénoncée par la communauté internationale n'a cessé d'enfler. Sur le fond, Pyongyang veut que les Etats-Unis reconnaissent son statut de puissance nucléaire et mette fin à sa «politique d'hostilité» à son égard, explique Scott Snyder, analyste au Council on Foreign Relations. Et l'exercice annuel Foal Eagle, qui se déroule depuis début mars jusqu'au 30 avril entre les forces américaines et sud-coréennes, n'a pas pour ainsi dire contribué à apaiser la situation. Bien au contraire. Une composante de ces manœuvres irrite particulièrement Pyongyang parce qu'elle simule le débarquement d'importantes forces américaines sur la péninsule coréenne en cas de conflit. Dès le 8 mars, un bombardier américain B-52, capable d'emporter une charge nucléaire, a survolé la Corée du Sud dans le cadre de cet exercice. Pyongyang a alors promis une «riposte militaire vigoureuse» en cas de nouvelle sortie. Washington, qui ne veut pas plier, n'a pas manqué de faire savoir qu'il y a eu depuis, d'autres sorties de B-52 mais, surtout, de ses bombardiers furtifs B-2, ce qui a été perçu comme un ferme avertissement. Parallèlement, à mesure que la tension a augmenté, surtout après les menaces nord-coréennes fin mars de frapper les Etats-Unis et ses îles de Guam et de Hawaii, Washington a répondu en déployant un nombre symbolique de chasseurs furtifs F-22, une batterie antimissile à Guam et deux destroyers antimissile dans le Pacifique occidental. A chaque fois en rendant le déploiement public. «Ce n'est pas un régime sur lequel on peut influer simplement avec des mots durs», selon un haut responsable américain sous couvert d'anonymat. Dés lors, est-on au bord de la guerre sur la péninsule coréenne? «On n'est pas au bord de la guerre, du moins à ce stade», assure un haut responsable américain. Rien sur le terrain ne laisse présager d'une action militaire d'ampleur de la part de Pyongyang, selon Washington. Comme la plupart des observateurs, Siegfried Hecker, professeur à l'université Stanford, pointe la vacuité des menaces nucléaires, tout en doutant des capacités des Nord-Coréens : «pourquoi lanceraient-ils une attaque nucléaire alors qu'ils savent parfaitement que cela résulterait dans la dévastation de leur pays et dans la fin du régime ?» Mais il n'écarte pas le risque d'un dérapage en un affrontement limité de la part d'un «jeune et novice» Kim Jong-Un.