Représentation - El-Nafas (Le souffle), un opéra de Tarik Benouarka, a été présenté, hier, au Théâtre national. Lorsqu'on a annoncé la représentation d'un opéra, le premier écrit et interprété en langue arabe, l'on s'imaginait aussitôt un grand spectacle, voire une démonstration où allaient se mêler amplement et remarquablement à l'expression musicale notamment, un merveilleux jeu scénographique, une grandiloquente marque théâtrale. L'on s'attendait à un spectacle grandiose. Mais, au final, on est désenchanté. El-Nafas (Le souffle) est l'intitulé du soi-disant opéra présenté, hier, au Théâtre national. L'entrée n'était que sur invitation, réservée à une élite. Lorsqu'on a prétentieusement annoncé dans un tintamarre médiatique ce rendez-vous exceptionnel, une première en Algérie, il était dit que celui-ci serait interprété par des ténors et des cantatrices. Il se trouve cependant que sur scène, le public ne découvre rien d'autre que des chanteurs et des chanteuses : le Libanais Gaby Odeimi, la Jordanienne d'origine palestinienne Lara Elayyan, la Libanaise Ghada Chbeir. Tous ont chanté un texte et, parfois, ce dernier était lu avec emphase. Seul l'Egyptien George Wanis, par sa voix forte et porteuse, semblable presque à celle d'un stentor, a donné au spectacle ce semblant d'opéra. Le spectacle, joué par l'orchestre symphonique français Pasdeloup, n'était autre qu'un récital musical où des instruments symphoniques venaient joliment s'associer à des instruments à l'identité arabe. L'on parle d'emblée de dialogue musical, d'un échange de mélodies, d'un partage d'univers ou d'imaginaire musical. Là, il y avait un travail de recherche, des compositions musicales, belles et soignées ; la création y était, sauf que le jeu musical en question ne produisait pas d'effet. Aucune émotion, aucune vibration. C'était simplement banal, malgré la beauté des sonorités que façonnaient avec une certaine délicatesse et élégance les différents instruments. En outre, il y a lieu de déplorer la défaillance qui était largement perceptible dans l'audibilité des voix des interprètes. Ces voix étaient voilées, cruellement étouffées par le sonore musical ; elles étaient en quelque sorte affreusement massacrées. Le musical l'a rudement emporté sur le vocalique. Les voix étaient à peine distinctes. Elles semblaient vagues, lointaines... El-Nafas n'est finalement qu'un récital de musique symphonique où venaient habilement se combiner des sons inspirés de la musique classique universelle et de la tradition musicale arabe, mais dont les mélodies sont modernisées. Un air de déjà vu et entendu. Car dire que c'est inédit, ce n'est qu'une aberration. Faïrouz, connue pour avoir modernisé et «symphonisé» la musique arabe, faisait pareillement à l'époque. Il n'y a donc eu aucune nouveauté dans El-Nafas.