Avis ■ La typologie urbaine actuelle de la Vallée du M'zab a aussi une part de responsabilité dans les dramatiques événements que connaît, ces derniers temps, Ghardaïa. C'est du moins ce que pense l'architecte urbaniste, Nemmour Hocine, responsable d'un bureau d'études, chargé de l'étude du plan permanent de sauvegarde et de mise en valeur du secteur sauvegardé de la vallée du M'Zab (Ppsmvss). Selon l'urbaniste, la Vallée du M'Zab, de par sa spécificité en tant que centre urbain historique classé comme patrimoine national et international, se présente autrement : «Nous avons le chapelet des 05 ksours, appelé la pentapole avec ses monuments territoriaux respectifs et d'un autre côté un tissu urbain extra-muros, majoritairement constitué de constructions illicites qui a provoqué une conurbation de toute la vallée depuis Dhaya Bendahoua en amont de l'Oued M'Zab jusqu'à El Atteuf en aval. C'est énorme et conflictuel pour la gestion urbaine et la protection du patrimoine» estime-t-il. Nemmour constate aussi l'urbanisation illicite des palmeraies et ce qui reste comme espaces libres du fond de la Vallée ainsi que Chaabat du relief naturel. En outre, l'architecte souligne que «les anciens quartiers de cette communauté comme Theniet El Makhzen, Hadj Messaoud, Mermed, Bensmara, etc connaissent un environnement urbain des plus déplorables». Il précise : «Nous avons des quartiers populaires où le cadre de vie est refoulant même pour son propre résident et aussi pour les nouveaux quartiers Mozabites comme Babasaad, Karkora, Babaoulejm» a-t-il repris. Nemmour estime aussi que les conditions de vie (spéculation foncière, absence de perspectives claires de développement urbain ...) font que tout le monde vit dans un climat urbain explosif au sein de toute la Vallée. Les zones d'habitat illicites se sont développées rapidement après les inondations de 2008 «ces nouveaux quartiers obstruent le cours d'eau des vallons qui alimentent l'Oued M'Zab, mais mettent en danger permanent ces habitants lors des pluies diluviennes. C'est là aussi où s'entassent une multitude de couches sociales d'ici et d'ailleurs qui font grossir le rang des contestations et des tensions sociales». Pour remédier à cela, le technicien Nemmour suggère : «Nous,les techniciens dans le cadre de nos missions locales (études des plans de sauvegarde, des POS, des aménagements urbains...), n'avons pas cessé de rabâcher depuis des années à qui veut bien nous entendre, la nécessité du lancement d'opérations de restructuration de quartiers extra-muros afin d'offrir un meilleur cadre de vie aux habitants où ils peuvent s'épanouir et s'identifier à leur ville.» Toutefois, l'architecte déplore la création inadaptée de nouveaux pôles urbains d'extension en forme urbaine comme celle des grands ensembles du Nord sur les hauteurs de la vallée du M'Zab comme Bouhraoua, Oued Néchou et la zone des sciences ‘'des cités dortoirs'' en l'absence d'espace verts pour le maintien du microclimat local saharien. ■ Le spécialiste en urbanisation met en garde aussi contre le phénomène de l'imminente conurbation entre ces nouveaux pôles urbains avec la Vallée du M'zab depuis Oued Néchou, au Nord, jusqu'à la ville nouvelle de Metlili El Djadida, au Sud-Est, «c'est catastrophique, non seulement pour la vallée en tant que secteur sauvegardé mais aussi pour la gestion urbaine de cet immense espace plein d'incohérences sur tous les aspects». Il appelle à une réelle volonté politique locale à travers des moyens financiers et l'implication de tous les acteurs concernés (administration, professionnels et société civile) dans une stratégie de planification urbaine intelligente et lucide pour pouvoir limiter les dégâts.