Histoire ■ Indépendamment des territoires qu'elle a mis sous sa coupe, la France n'a pas oublié de coloniser leurs peuples et de les réduire quasiment au rang de serfs. Lorsqu'il a fallu se battre contre les Allemands pendant la Première Guerre mondiale, c'est d'abord et avant tout aux indigènes qu'elle pensera, car ils sont une chair à canon disponible pour tous les conflits. Des dizaines de milliers d'entre eux seront enrôlés dans les rangs de l'armée française et constitueront des régiments à part, comme les thabors, les tirailleurs, les goumiers et les spahis. Des centaines tomberont sous les balles de l'ennemi et mourront pour la France, à Verdun, dans les tranchées. Parmi eux, de nombreux Algériens. Pour certains d'entre eux, leur sépulture ne sera jamais retrouvée, quelques uns seront carrément jetés dans une fosse commune. Pendant la Seconde Guerre mondiale, tous les indigènes d'Afrique, d'Asie et d'Océanie qui avaient 18 ans révolus et en âge de porter les armes, seront appelés sous les drapeaux pour combattre un ennemi qui n'était pas le leur et mourir pour une patrie qui n‘était pas la leur. Le nombre exact des victimes est un secret bien gardé, mais on peut avancer sans risque de se tromper le chiffre de plusieurs dizaines de milliers. Au cours de ce conflit qui mettra l'Europe à feu et à sang, les Algériens feront preuve d'un héroïsme exceptionnel qui étonnera même l'état-major, comme l'adjudant, Ahmed Ben Bella, qui s'est particulièrement distingué en Italie pendant la bataille de Monte Cassino. Il sera d'ailleurs décoré par le général de Gaulle lui même, qui lui épinglera la légion d'honneur. Des Algériens tombés en Roumanie seront enterrés dans la hâte et la précipitation dans des cimetières chrétiens. Il faudra attendre la nomination à Bucarest d'un ambassadeur algérien... du nom de Liamine Zeroual pour qu'ils aient enfin une sépulture décente en conformité avec notre religion. Mais ce ne sera pas le seul couac de l'armée française, il y en aura d'autres, comme cette histoire authentique : en 1944, au cours d'un accrochage avec les Allemands, un officier breton perdra la vie. Le capitaine commandant la compagnie lui rendra les honneurs militaires. Au cours d'un autre accrochage, un officier algérien, pourtant si rare dans l'effectif de cette armée, sera tué par l'explosion d'une mine, aucun hommage ne lui sera rendu. Quand un sous-officier musulman demandera au capitaine pourquoi ces deux poids et deux mesures, le capitaine aura cette réponse atroce : «L'officier français est mort pour sa patrie, l'Arabe s'est engagé pour la soupe, il est mort pour la soupe...» Et lorsque les Vietnamiens, à l'époque on disait les Indochinois, se soulèveront pour arracher leur indépendance, la France fera appel à la même chair à canon, aux indigènes des colonies... pour combattre d'autres indigènes. Mais cette fois, la donne va changer... Les indigènes de Saïgon battront la France, à plate couture à Dien Bien Phu...