Evocation Youcef Dris, auteur des Amants de Padovani, nous plonge irrésistiblement dans un maelström de réminiscences passionnelles grâce à une écriture incisive, concise et précise. Son roman, à la fois émouvant et déchirant, nous interpelle au détour d?une rue, d?une ruelle ou d?une petite venelle du populeux quartier de Belcourt et de la rue d?Isly en ce début du XXe siècle. Le roman de Youcef Dris nous rappelle à l?ordre pour méditer sur l?amour idyllique de Dahmane et d?Amélie. Un amour fou, terrible et envahissant, qui finira par imposer sa raison d?être dans une Algérie stigmatisée par un siècle de colonialisme nourri à la mamelle de l?indigénat scélérat. Comme dans un mauvais conte de fées, Dahmane quitte son village de Kabylie, à la mort de son père en compagnie de sa mère et de sa grand-mère Fatma, pour Alger. Ce fut un tournant décisif dans la vie de Dahmane qui va alors vivre des moments intenses auprès d?Amélie. Il ne la quittera plus, jusqu?à la mort tragique de celle qui allait porter plus tard son enfant. Ce fut d?abord «l?apprentissage» du petit Dahmane des us et coutumes des «roumis» auprès de la famille de maître Démontes, qui habitait la rue d?Isly. Acculé par sa fille Amélie, Me Démontes inscrira «Dédé» à l?école maternelle, primaire et secondaire, toujours en compagnie d?Amélie. Ensemble, ils décrochent le baccalauréat dans les année trente. Et c?est le basculement. Vacances à St-Raphaël et à Aix-en-Provence, chez les grands-parents d?Amélie, qui accueilleront le «petit indigène», ami indéfectible de leur petite-fille. A St-Raphaël, c?est l?éclatement au grand jour de l?amour entre Dahmane et Amélie. Retour à Alger et vacances prolongées à la villa de Me Démontes, à Pointe Pescade. Les sorties de Dédé et d?Amélie à la plage Padovani font déjà jaser les pieds-noirs. Sombre histoire pour une pathétique liaison d?amour ardent entre l?«indigène» et la pied-noir. Ce sera le commencement de la fin, sur fond d?apartheid colonial. La grand-mère de Dahmane est impitoyablement chassée de son poste de servante par Me Démontes, au bout de quinze années de bons et loyaux services. Dahmane, injustement accusé de meurtre, est jeté en prison par le père d?Amélie. Amélie, enceinte, est en exil forcé à St-Raphaël où elle mourra en donnant naissance à un garçon? Le roman de Youcef Dris est ponctué de scènes insoutenables sur cette période précise de l?entre-deux guerres. Le lecteur est assuré de recevoir une charge émotionnelle incommensurable. Les Amants de Padovani, un roman à lire absolument. * Youcef Dris, Les Amants de Padovani, 142 pages, éditions Dalimen, Alger 2004