Résumé de la 21e partie n La fleur sacrée était le nom que m'avait donné mon mahout, et ses paroles m'avaient profondément pénétré. Je faisais enfin, mais mieux que tous les autres, tout ce que font les éléphants bien dressés, et je le faisais de ma propre volonté, non d'une manière banale, mais pour mon seul ami. Dès que nous eûmes atteint la frontière birmane, une députation du souverain vint au-devant de moi. Je fus inquiet du cérémonial qui m'entourait. Je vis que l'on donnait de l'or et des présents aux chasseurs malais qui m'avaient accompagné et qu'on les congédiait. Allait-on me séparer d'Aor ? Je montrai une agitation effrayante, et je menaçai les hauts personnages qui approchaient de moi avec respect. Aor, qui me comprenait, leur expliqua mes craintes, et leur dit que, séparé de lui, je ne consentirais jamais à les suivre. Alors, un des ministres chargés de ma réception, et qui était resté sous une tente, ôta ses sandales, et vint à moi pour me présenter à genoux une lettre du roi des Birmans, écrite en bleu sur une longue feuille de palmier dorée. Il s'apprêtait à m'en donner lecture lorsque je la pris de ses mains et la passai à mon mahout pour qu'il me la traduisît. Il n'avait pas le droit, lui qui appartenait à une caste inférieure, de toucher à cette feuille sacrée. Il me pria de la rendre au seigneur ministre de Sa Majesté, ce que je fis aussitôt pour marquer ma déférence et mon amitié pour Aor. Le ministre reprit la lettre, sur laquelle on déplia une ombrelle d'or, et il lut : «Très puissant, très aimé et très vénéré éléphant, du nom de Fleur sacrée, daignez venir résider dans la capitale de mon empire, où un palais digne de vous est déjà préparé. Par la présente lettre royale, moi, le roi des Birmans, je vous alloue un fief qui vous appartiendra en propre, un ministre pour vous obéir, une maison de deux cents personnes, une suite de cinquante éléphants, autant de chevaux et de bœufs que nécessitera votre service, six ombrelles d'or, un corps de musique, et tous les honneurs qui sont dus à l'éléphant sacré, joie et gloire des peuples.» On me montra le sceau royal, et, comme je restais impassible et indifférent, on dut demander à mon mahout si j'acceptais les offres du souverain. Aor répondit qu'il fallait me promettre de ne jamais me séparer de lui, et le ministre, après avoir consulté ses collégues, jura ce que j'exigeais. Alors, je montrai une grande joie en caressant la lettre royale, l'ombrelle d'or et un peu le visage du ministre, qui se déclara très heureux de m'avoir satisfait. A suivre