Résumé de la 3e partie n Le lendeman, l'ogre conduisit Martin devant un épais fourré, à cent pas de la maison et l'arma d'une cognée… Il alluma sa pipe, descendit à la cave, y chargea son épaule d'un baril de bière, se rendit ensuite à la salle à manger, choisit dans le dressoir une pinte de la contenance d'un pot, puis monta à son belvédère pour voir comment allait s'en tirer le pauvre Martin. Martin n'essaya même point de donner le premier coup de cognée. Il songeait à s'enfuir, quand Martine vint le rejoindre, en se glissant d'arbre en arbre. «Tenez-vous derrière moi, dit-elle, et cachez-moi bien, que mon père ne me voie.» Et, sur-le-champ, elle toucha les arbres de sa baguette, et les aulnes, les charmes, les trembles, les platanes, les hêtres touffus, les frênes aux rameaux élancés, les pâles peupliers, les bouleaux à la robe d'argent, les chênes centenaires, les châtaigniers, les érables, les merisiers, les cornouillers tombèrent tour à tour avec un fracas épouvantable. Les oiseaux s'envolaient par bandes en jetant des cris d effroi, et aussi s'enfuyaient, affolés de peur, les chevreuils, les daims, les cerfs, les renards, les loups et les sangliers. Du haut de son belvédère, l'ogre contemplait cet immense abattage. Il ouvrait des yeux grands comme des roues de charrette et ne pouvait en croire ses yeux. Sa surprise était telle, qu'il en oubliait de boire et laissait sa pipe s'éteindre. Il avait pourtant trop d' amour-propre pour montrer son étonnement, et, quand le petit boquillon revint avec sa cognée, il lui dit d'un air railleur : «Tu ne t'entends point trop mal à mettre les écureuils à pied, mais tu ne m'as fait qu'un quart de jour. Il s'agit maintenant de me creuser un vivier à l'endroit que tu viens de nettoyer. Voici une bêche, nous verrons si tu en joues aussi bien que de la cognée.» Puis il ajouta en s adressant à sa fille : «Quant à vous, mademoiselle, vous allez me suivre et vous me direz vos plus belles chansons, pour me tenir éveillé pendant que ce beau lapin fera son trou. Il avait cru apercevoir une robe blanche dans le grand massacre des arbres, et il soupçonnait vaguement sa fille. Martin retourna à la clairière, et, comptant sur Martine, il commença de bêcher, comme s'il ne s'était agi que de faire une fosse pour un frêne. Martine chanta d'abord ses chansons les plus gaies ; puis peu à peu elle ralentit la mesure, tant qu'enfin l'ogre laissa tomber sa pipe à terre, sa tête sur l épaule et tomba lui-même dans un profond sommeil. A suivre