Passion Dès que le rouge-gorge se met à gazouiller dans les buissons ou sur les haies des champs pour signifier que l?hiver est là, les chasseurs savent que le moment est venu... A chaque saison oléicole, ces oiseaux migrateurs, venus de l?Europe où ils nichent, arrivent dans les oliveraies de Kabylie où ils sont assurés de trouver «gîte et couvert» pour se gaver d?olives, jusqu?au début du printemps, avant de rejoindre leurs aires de reproduction. Ces passereaux y viennent par petits groupes dès le mois d?octobre, avant de se fédérer, fin décembre, en grandes nuées visibles et observables dans les airs et dans les champs. A Thiniri, une vaste et dense forêt d?oliviers encaissée entre les communes des Ouadhias et de Boghni, à une trentaine de kilomètres au sud de Tizi Ouzou, les chasseurs choisissent les temps brumeux et de pluie fine ? moment prisé par ces passereaux pour picorer les olives et remuer l?humus des arbres à la recherche de vers et de jeunes pousses ? pour tendre leurs pièges en des endroits de convergence de ces oiseaux. Il existe de multiples pièges. Le plus courant consiste en un dispositif formé de deux arcs de fil de fer superposés, coulissant sur un ressort et pouvant être écartés et coincés au moyen d?une tige de fer, destinée également à maintenir le support de l?appât. Le piège est actionné dès que l?oiseau becquette sa proie. La capture du gibier se fait également au moyen d?un n?ud coulant fixé à une branche flexible d?olivier. Toutefois, la chasse à grande échelle se fait à l?aide de la glu, dont on enduit les branches d?arbres, pour prendre les oiseaux qui s?y posent. Le collet, le filet, la lampe utilisée de nuit sont d?autres procédés de chasse d?oiseaux. Une fois la pose des pièges terminée, les chasseurs, agissant de préférence par petits groupes, se chargent de rabattre le gibier vers les lieux des traquenards. Cette tâche terminée, ils font le guet à partir d?un promontoire pour surveiller les pièges, afin d?éviter qu?ils ne soient subtilisés par des maraudeurs, toujours à l?affût. Après un certain temps, il faudra visiter les pièges pour prélever le gibier pris. Il faudra également replacer les pièges désamorcés, en renouvelant l?appât. L?opération peut se répéter plusieurs fois dans la journée et ce, parfois, jusqu'à la tombée de la nuit. Le nombre de pièces de gibier prises quotidiennement varie en fonction des pièges tendus, mais aussi des facteurs climatiques, en ce sens que les oiseaux sont plus nombreux en période de froid que par temps ensoleillé. Toutefois, même ceux qui rentrent bredouilles ou capturent du menu fretin, ne se découragent jamais et n?hésitent pas à repartir à la chasse, tant ils sont empêtrés dans les rets de leur passion. D?ailleurs, il est établi de longue date que celui qui a goûté à la chair de la grive rôtie sur braises, en redemandera et de ce fait, se fera un devoir de chasser encore?