Résumé de la 3e partie Au petit matin, dans un autre endroit de l'île, des carabiniers voient deux hommes qui s'enfuient en abandonnant un enfant. C'est Nouredine ! Quant aux conditions précises de la libération de Nouredine, la police nie, évidemment, que Graziano y soit pour quelque chose. Il n'y a eu aucune tractation, aucun marchandage, notamment aucune quelconque impunité promise aux ravisseurs. Il est néanmoins évident que l'intervention du bandit repenti a été décisive. Conformément à la loi, après la libération de Nouredine, il a été remis en prison, mais toute l'Italie demande sa grâce. C'est également l'avis du juge d'application des peines, responsable de sa libération provisoire, qui déclare à la presse : «J'ignore le rôle exact qu?a joué Graziano M. dans l'affaire Nouredine, mais je sais qu'il a risqué sa vie pour sauver cet enfant. Il mérite d'être gracié.» La police nie également qu'une rançon ait été versée. Mais des bruits circulent selon lesquels les ravisseurs auraient touché les deux milliards de lires qu'ils demandaient. Si c'est vrai, l'argent ne pouvait provenir du père de Nouredine, qui n'avait pas une telle somme. Mais on ne peut exclure que des riches donateurs aient organisé une collecte, voire que l'Etat ait prélevé lui-même la somme sur des fonds secrets. Quoi qu'il en soit, le chef de la police dénonce devant les micros et les caméras ce qui sera la version officielle : «La libération de Nouredine est le fruit d'une opération concertée de la justice et des forces de l'ordre, qui ont ratissé la zone...» Tandis que sa libération provoque des manifestations de liesse en Sardaigne et dans toute l'Italie, pour tenter de lui faire oublier en partie son calvaire ? ce qui ne sera certainement pas possible totalement, car il en sera marqué à vie ?, ses parents emmènent Nouredine en France, où madame L. a de la famille. C'est dans une grande propriété, à deux cents kilomètres de Paris, que le petit Nouredine tente de réapprendre à vivre. Ses parents lui ont offert une voiture télécommandée. Pour se distraire, il a la compagnie de son cousin âgé de sept ans, et aussi de sa petite chienne, qu'il a retrouvée. Pour consoler l'enfant, son père lui a dit que ses ravisseurs avaient été arrêtés. C'est faux, ils courent toujours. Mais dans un pays où tout se sait, la police connaît leur identité ou, du moins, celle de leur chef, Matteo B. Agé de trente-cinq ans, il est un des malfaiteurs les plus dangereux d'Italie. Condamné à treize ans de prison pour enlèvement et vol à main armée, il a été le premier à s'évader, en septembre 1986, du pénitencier de l'île d'Asinara, chose réputée impossible jusque-là. Il est ensuite, selon toute vraisemblance, retourné dans sa Sardaigne natale. Il est d'ailleurs né au c?ur de la Barbagia. Tant qu'il restait dans l'île, protégé par tout un réseau de complicités, il était pratiquement invulnérable, mais brusquement, début octobre 1992, il se rend en Corse, avec sa compagne, Loredana, enceinte, et les deux enfants de cette dernière. Les Italiens informent leurs collègues français, qui les localisent dans un hôtel de Porto-Vecchio. Les précautions les plus grandes sont prises pour son arrestation. Des renforts de gardes mobiles sont demandés. Tout le quartier est bouclé ; l'hôtel lui-même est investi par des dizaines d'inspecteurs déguisés en clients ou en membres du personnel. Quand Matteo B. descend dans la salle du restaurant pour prendre son petit-déjeuner, le 13 octobre, à 7 heures, une dizaine de policiers lui sautent dessus. Avant qu'il ait pu comprendre quoi que ce soit, il est neutralisé... A l'heure actuelle, on en est là. D'autres arrestations vont sans doute suivre. C'est donc par une note d'espoir que se termine l'enlèvement du petit Nouredine. Cette dramatique affaire aura vu, pour la première fois, la loi du silence brisée et l'arrestation, dans des délais remarquablement brefs, du chef présumé des ravisseurs. Souhaitons qu'elle marque un coup d'arrêt à l'industrie des enlèvements en Italie. Actuellement, cinq personnes, toutes adultes, sont encore, dans ce pays, entre les mains de ravisseurs.