Résumé de la 1re partie Le 15 janvier 1992, dans un village de Sardaigne, des hommes font irruption chez Slimane L., dont ils enlèvent le fils aîné Karim. Le rapt est signé Anonima Sequestri. Rien ne se produit pourtant et l'angoisse monte encore. Après l'évêque de Cagliari, capitale de la Sardaigne, qui a multiplié les appels, le pape en personne demande aux ravisseurs la libération de Nouredine. Des millions d?Italiens suspendent un drap blanc «de la miséricorde» à leur fenêtre, tandis que les églises sont pleines de fidèles qui prient pour l?enfant. Enfin, début avril, les parents de Nouredine reçoivent une lettre. Nouredine est vivant et c?est l?essentiel, même si le contenu du message, écrit de la main de l?enfant sous la dictée, est pressant et même inquiétant. «Maman et papa, je sais que vous travaillez doucement, mais il faut faire vite. Maman et papa, je sais que vous voulez me revoir, mais les émissaires doivent aller plus vite. Maman et papa, ici, nous sommes tous fatigués.» Mais que peut faire le malheureux père qui a vendu, en cachette de la police, son bateau, son seul bien, et qui n'en a tiré que quelques dizaines de milliers de francs ? Et, à la mi-juin, c'est le drame ! Le curé de P. reçoit un paquet contenant un morceau du lobe de l'oreille de l'enfant. Une photo y est jointe, montrant les ravisseurs pratiquant l'horrible mutilation, et l'envoi s'accompagne d'un ultimatum : si la rançon de Nouredine, fixée à présent à deux milliards de lires, n'est pas versée dans les dix jours, il mourra. Cette fois, l'émotion est tellement grande dans le pays que cela devient une affaire d'Etat. Ce n'est pas la première fois, en Italie, que des preneurs d'otages coupent un morceau d'oreille ou de doigt pour terroriser les familles. La première victime de cette pratique a été Paul Getty III, fils du milliardaire américain Paul Getty, en 1973, à Rome. Mais faire cela à un enfant est un fait sans précédent ! Le ministre de l'Intérieur demande à celui de la Défense des soldats pour prêter main-forte à ses carabiniers. Il obtient satisfaction et ce sont douze mille hommes qui sont envoyés en Sardaigne ! Une véritable armée fouille le maquis de la Barbagia, au centre de l'île, où l'enfant est certainement caché. La fouille ne donne rien. C'était d'ailleurs pratiquement sans espoir, malgré les moyens déployés. La Barbagia est une vaste région de deux mille kilomètres carrés, qui regorge de cachettes et qui a, de tout temps, servi de refuge aux bandits et aux rebelles... C'est alors qu'intervient le personnage le plus étonnant de toute cette histoire. Graziano M., Sarde de cinquante-deux ans, est surnommé la Primevère rouge ou le Robin des Bois sarde, ou encore le Roi de la Montagne. C'est lui qui a inventé, dans les années soixante, en Sardaigne, l'industrie du rapt. Mais lui l'a pratiquée avec des règles élémentaires de morale. Il n'enlevait que les riches, ce qui lui a valu une étonnante popularité dans la région, et il ne touchait ni aux femmes ni aux enfants. Jamais il n'aurait commis un enlèvement du genre de celui de Nouredine. On rappelle cette anecdote qui date des années soixante-dix : ses hommes avaient enlevé un petit garçon en même temps que son père. Il a immédiatement fait relâcher l'enfant et lui a donné mille lires pour qu'il puisse s'acheter une glace. Cela fait près de trente ans qu'il est en prison, et c'est le curé de P. qui pense à recourir à lui, car nul ne connaît mieux le maquis sarde, et il est le seul qui puisse avoir quelque autorité auprès des ravisseurs. (à suivre...)