Fait n Evénement cardinal de la Guerre de Libération nationale, le Congrès de la Soummam, qui a regroupé les responsables de l'ALN et du FLN, doit sa réussite à une préparation sans faille sur le plan sécuritaire. Une mission qui a été confiée, par Krim Belkacem, au seul homme qu'il jugeait capable de bien l'accomplir : Amirouche Aït Hamouda, qui était, à l'époque, chef militaire de la Petite Kabylie, où il était chargé de l'organisation des maquis. La tâche était délicate. Amirouche devait trouver un endroit offrant toutes les conditions sécuritaires nécessaires aux congressistes. Il pensa au village d'El-Kelaâ, dans les Aït Abbas, situé à proximité de la forêt de Boni avec un prolongement vers Beni Ouagagues au sud de la forêt Chekbou, l'endroit réunissait toutes les conditions de sécurité pour l'événement. Le choix était aussi symbolique. El-Kelaâ est le village d'El-Mokrani, ancien chef de l'Insurrection de 1871. Tout était prêt pour la tenue du Congrès en juillet 1956. On commençait déjà à acheminer des documents, quand tout a été annulé à cause d'une négligence, un incident que personne n'avait prévu : la mule chargée de tous les documents du Congrès, échappe à un groupe de moudjahidine lors d'une embuscade, pour aller rejoindre un poste militaire près de Tazmalt. Toutes les informations relatives au Congrès, les secrets de la Guerre de Libération nationale étaient entre les mains de l'ennemi ! ! C'était un coup dur pour Amirouche Aït Hamouda. «Envahi par la lassitude et le dégoût, il couva sa colère. Il était presque désemparé (?) Il sentait le besoin de réfléchir, il y allait de l'intérêt de la Révolution et de son propre avenir», témoigne Djoudi Attoumi. Les responsables de l'ALN pensèrent à l'annulation du Congrès, après un vaste ratissage qui a touché, le 1er août 1956, la région située entre Sétif, Bordj Bou-Arréridj, Bouira, Akbou et Béjaïa (opération Du Four) et le bombardement intense du village d?El-Kelaâ. Mais Amirouche, déterminé et opposé à l'idée de tenir le Congrès dans une autre région ? surtout que les congressistes étaient proches du lieu de la rencontre ? proposa à Krim Belkacem un autre endroit situé sur la rive gauche de la Soummam à une vingtaine de kilomètres à vol d'oiseau d?El-Kelaâ. Il s'agit du village d?Ouzellaguen. Commença alors la mise en place du dispositif sécuritaire. Outre les hommes dont il disposait (plusieurs centaines de moudjahidine bien armés et bien entraînés), Amirouche impliqua aussi les habitants sur qui il pouvait compter. Un dispositif sécuritaire sans faille Le renseignement sur le mouvement de l'armée française était un élément essentiel dans la préparation du Congrès. Djoudi Attoumi témoigne que «les réseaux (de renseignement, ndlr) étaient renforcés au niveau de chaque village et tout autour des postes militaires, à partir même des maisons limitrophes des postes militaires. Les voisins immédiats de ces camps étaient tenus de faire un signal significatif, dans le cas d'un mouvement suspect de l'ennemi. Il s'agissait, par exemple, d'étendre un drap blanc à un endroit déterminé, d?allumer une lampe électrique la nuit, en faisant certains signaux préalablement convenus, de suspendre un tissu dont la couleur était significative?». Les vigiles se relayaient pour guetter le moindre mouvement suspect (effectifs des postes de surveillance, mouvement de véhicules militaires, détection des mouchards et même la quantité du pain commandé par l'ennemi n'était pas négligée). Tout était mis en place pour recevoir les congressistes qui commençaient à arriver à Ifri Ouzellaguen début août 1956. Le 20 Août 1956, le Congrès eut lieu, protégé par un véritable cordon de sécurité que formaient les villages Ighbane, Timliouine, Ighil Oudles? où les unités combattantes étaient postées. 3 000 hommes furent ainsi mobilisés. Amirouche effectuait des tournées ou convoquait les chefs d'unités pour leur donner des instructions. La vigilance était telle que les unités et leurs chefs ignoraient tout du Congrès qu'ils étaient chargés de protéger. Alors que les travaux étaient entamés par les congressistes, des actions de diversion étaient organisées très loin de la Soummam. Des comptes rendus réguliers parvenaient à l'organisation du Congrès, Amirouche ne laissait rien au hasard. Une véritable toile a été tissée autour du Congrès de la Soummam dont les travaux durèrent dix jours. Dix longs jours où le «Lion de la Soummam» veillait à la sécurité et à la protection de ceux qui allaient donner à la Guerre de Libération nationale les moyens et la stratégie pour aboutir. Amirouche Aït Hamouda fait partie de ceux qui ont permis la concrétisation d'un aussi important et indispensable projet.