Paranormal Elle disait que ses ustensiles de cuisine n?étaient jamais à la place où elle les avait laissés. A Bordj Bou-Arréridj, on ne l?appelle pas autrement que par Dar Edhiaf, la maison des invités. Il s?agit d?une très imposante villa des faubourgs nord de la ville, construite dans un style colonial, avec jardin et dépendances. Le temps ne l?a nullement entamée. On avait l?impression, au contraire, que les années l?avaient rendue plus belle, un peu comme l?est un château datant d?un autre âge, bien qu?elle n?existât que depuis la fin des années 1960. Une chose est certaine en tout cas : Dar Edhiaf impose le respect à quiconque la voit pour la première fois, ne serait-ce que de loin. Pour les Bordjis, il en est autrement, car cette belle demeure de trois étages conçue pour abriter plusieurs familles est déserte. Ses occupants, issus d?une famille très connue, l?auraient abandonnée depuis longtemps déjà, au prétexte qu?elle serait hantée. C?est la raison pour laquelle les voisins immédiats de la belle villa et les autres riverains évitent de la longer. De peur certainement de provoquer on ne sait quel maléfice, on évite même d?en parler. Selon une croyance bien ancrée dans la ville, il s?y serait passé un drame terrible. La maîtresse de maison, affreusement brûlée, aurait trouvé la mort dans l?une des pièces. On dit que cela serait arrivé quelque temps après que la défunte eut fait part à des voisins d?événements troublants. Selon la version rapportée par une parente, la pauvre femme, qui ne partageait, à l?époque, la maison qu?avec son époux et une vieille tante, aurait remarqué des «choses», qui lui paraissaient anormales. Elle en aurait fait part à sa vieille tante d?abord et à son époux ensuite. Les «choses» se seraient précisées au fil du temps pour se concrétiser par des actes. Elle disait, par exemple, que ses ustensiles de cuisine n?étaient jamais à la place où elle était certaine de les avoir laissés, ou que le parquet était souvent lavé à grande eau, alors qu?elle se trouvait dehors avec son époux et la vieille parente. Le plus incroyable des événements qu?aurait racontés la maîtresse de maison se rapporte à ce fameux jour quand elle rentra dans sa cuisine et qu?elle trouva le repas encore chaud sur son fourneau, prêt à être servi et la table dressée pour autant de personnes qui habitaient dans la maison. On dit que personne ne prêtait alors crédit à ce que disait la malheureuse croyant qu?elle sombrait dans la folie. Les circonstances du drame telles que racontées par les deux témoins cités plus haut ont de quoi hérisser les cheveux des plus téméraires. La dame de Dar Edhiaf revenait, paraît-il, d?un mariage et était parée de ses plus beaux atours. Son époux, qui l?accompagnait, se serait attardé dans l?antichambre du rez-de-chaussée à discuter avec sa parente âgée et elle se serait dirigée vers la cuisine d?où se dégageait une odeur de nourriture fraîchement préparée. Soudain un cri strident se serait fait entendre. Les deux témoins auraient accouru vers la pièce d?où venait le hurlement et auraient entendu la pauvre femme pleurer en disant «Elle est là ! Elle veut me prendre ma maison ! Empêchez-la?» Ce seraient là les dernières paroles de la maîtresse de maison avant qu?elle ne tombe raide morte, le visage et le haut du corps complètement calcinés. Non loin d?elle on aurait trouvé une pleine marmite de soupe bouillante? Depuis ce jour maudit la maison fut abandonnée aux invités.