Décor n A l'entrée du site déjà, l'état du terrain de foot, à droite de la route, au- dessus d'un versant tapissé de chênes zen, donne le ton? Le gazon où se sont entraînés les Belloumi, Madjer, Zidane, Saâdane et autres n'est plus qu'un immense étang limité par des restes de bois de chaque côté, et les cris et applaudissements épatés des jeunes du coin venus admirer leurs idoles, ont été remplacés par le bruit d'une scie électrique débitant du bois pour alimenter les fourneaux d'un petit restaurant situé juste au-dessus du dernier gradin. A côté, les deux terrains de basket, pas mieux lotis, sont jonchés de détritus de toute sorte. De la palissade grillagée qui clôturait le site, il ne reste que quelques poteaux encore debout. Nous quittons ce lieu désolé et désert, pour entrer dans le complexe situé de l'autre côté de la route qui descend. Nous y sommes accueillis par le gardien des lieux, un sexagénaire, ravi de trouver une oreille attentive à sa colère. Il est réellement ulcéré par l'état d'abandon dans lequel se trouve ce haut lieu du sport, lui qui a été témoin de ses «années de gloire». D'emblée, il s'écrie : «El-houkouma est absente, je le dis et pourrais le répéter même devant le président ! Elle est absente ! Personne ne se soucie du bled ! Comment un tel bijou est-il ainsi abandonné, sans que personne s'en soucie? Ce sont des milliards qui sont perdus, de l'argent jeté par les fenêtres ! Il fallait voir le Creps autrefois, c'était un véritable paradis pour les sportifs ! Quel gâchis !» L'homme rougit, gronde, s'emporte et on voit que cette dégradation lui tient vraiment à c?ur. Il nous précède et veut tout nous faire visiter. Les dimensions des infrastructures sont à la hauteur de la réputation du centre, autrefois connu au niveau international. Notre hôte nous entraîne d'abord devant l'immense salle omnisports que nous ne pouvons visiter «les clés sont à Annaba, au niveau de la direction». Une structure bâtie en dur à sa base, mais de tous ses flancs en verre, pour laisser entrer la lumière, il ne reste que les carcasses. Toutes les vitres sont brisées et jonchent le sol alentour. Et là, première révélation : «L'ancien vitrage blanc, d'une épaisseur de 24 mm, a été complètement détruit par l'entreprise venue faire la réfection du Creps. Pourtant, il n'y avait que trois ou quatre vitres à remplacer. Puis, ils ont placé un vitrage fumé de 18 mm qui n'a pas résisté aux premières rafales de vent. Le 4 septembre 2003, il a été littéralement pulvérisé». De plus les cadres, qui étaient en fer, ont été remplacés par d'autres en matière moins solide, et les auvents protégeant les façades ont été simplement démontés et jetés.» Il nous montre des débris de tôle tordue, jonchant l'arrière de la salle. Autour des bâtiments abritant la salle de sports, la piscine, la cafétéria, le bloc administratif, le sol est recouvert d'un épais tapis de feuilles mortes et des tas de cadres de bois brisés, de carcasses de toutes sortes voisinent avec une dizaine de vieilles cuisinières cassées, près d'un amas de vieux lits rouillés et retenus par des fils de fer. L'endroit fait beaucoup plus penser à un dépotoir qu'à un complexe sportif autrefois très prisé pour son air pur, la nature généreuse qui l'entoure et le calme du village de Seraïdi. Un projet sans lendemain l Le 3 février 1976, l'ex-ministre de la Jeunesse et des Sports, Abdallah Fadel, avait posé au Creps, la première pierre pour la construction d'un hôtel de 402 lits. Destiné à l'accueil des athlètes de haut niveau de tout le pays venant s'entraîner à Seraïdi, ce projet n'a cependant jamais vu le jour.