Critiques n Un des films les plus attendus du Festival de Cannes, Marie-Antoinette de la réalisatrice américaine Sofia Coppola, a raté son entrée en compétition mercredi. Il a été franchement hué à l'issue de la première projection. La réaction de la salle, à l'issue des deux heures de projection, a été une des plus négatives depuis le début du festival, et plus hostile par exemple qu'à la fin de la projection du Da Vinci Code. «Il vaut mieux obtenir une réaction tranchée de gens qui aiment soit beaucoup soit pas du tout le film plutôt qu'une réponse tiède», a commenté la réalisatrice en conférence de presse. Marie-Antoinette, dont le rôle principal est tenu par Kirsten Dunst et qui a été en partie tourné à Versailles, dépeint la dernière reine de France comme une adolescente arrachée à son environnement viennois, jetée en pâture à une cour dont elle ignore tout du protocole. Délaissée par son mari, un Louis XVI timide et falot, mise sous pression pour lui donner un héritier alors que leur mariage tarde à être consommé, cette reine «punkette» tente néanmoins de vivre ses émois à travers les fêtes et les excès propres à la jeunesse, et aussi ses séances de coiffeur ou du «shopping» avant l'heure avec ses dames de compagnie. Car Marie-Antoinette, dans la forme comme le fond, revendique des résonances contemporaines. Formellement, cette œuvre est un objet pop. Et bien sûr dans sa bande originale anachronique, largement composée de morceaux néo-romantiques des années 1980 ou de musiques rock (The Cure, Gang of Four, Bow Wow Wow, New Order...). Sur le fond, Sofia Coppola a voulu décrire des adolescents qui vivent leur transition vers l'âge adulte, un thème intemporel même s'il s'agit là d'adolescents qui président à la destinée de la France. Ce film synthétise les thèmes qui sous-tendaient les deux premiers longs-métrages de la réalisatrice de 35 ans : la quête adolescente de Virgin Suicides et l'inadaptation d'un personnage transporté dans un environnement étranger, voire hostile de Lost in translation. Mais de l'avis d'une bonne part des festivaliers, ce bel objet manque de la profondeur des deux films précédents, salués en leur temps par la critique. Ce sont d'ailleurs peut-être les grosses attentes suscitées par ces deux premiers films qui expliquent en partie l'accueil déçu de Marie-Antoinette lors de sa première projection de presse. «Dans mes trois films, on retrouve des jeunes filles qui cherchent leur chemin, et on peut voir celui-ci comme le dernier chapitre des trois», a affirmé Sofia Coppola. Ce jeudi, Cannes accueille en compétition Indigènes, de Rachid Bouchareb, qui rappelle le rôle de l'armée d'Afrique pendant la Seconde Guerre mondiale, et L'ami de la famille, de l'Italien Paolo Sorrentino.