Parmi les films en compétition, Indigènes de l'Algérien Rachid Bouchareb qui évoque la vie de soldats africains engagés dans l'armée française lors de la Seconde Guerre mondiale. Ça y est, la 59e édition du Festival de Cannes a été solennellement ouverte mercredi soir par la projection hors compétition du film Da Vinci Code, de Ron Howard. Perçu comme une provocation de l'Eglise, ce film a finalement fait un flop auprès des critiques de cinéma qui n'ont vu qu'une longue franche rigolade. Dix-neuf films issus de douze pays ont passé le cap d'une sélection à laquelle mille cinq cents films ont postulé. Cette sélection est un cocktail composé d'une majorité de grands auteurs, habitués de la compétition. L'Europe tient la part du lion, l'Asie est en net retrait, les Etats-Unis et la France, comme d'ordinaire, dominent. Le jury officiel, présidé par le cinéaste de Hongkong Wong Kar-waï et composé de l'actrice italienne Monica Bellucci, de l'actrice anglaise Helena Bonham-Carter, de la réalisatrice argentine Lucrecia Martel, de l'actrice chinoise Zhang Ziyi, de l'acteur américain Samuel L.Jackson, du réalisateur français Patrice Leconte, de l'acteur et réalisateur anglais Tim Roth et du réalisateur palestinien Elia Suleiman a du pain sur la planche. La compétition officielle du Festival de Cannes a débuté jeudi avec deux films dont le moteur central est l'histoire: la guerre d'indépendance dans l'Irlande de 1920 pour le Britannique Ken Loach, à travers Le vent se lève et la répression du mouvement prodémocratique de 1989 pour le Chinois Lou Ye dans son film Palais d'été. Vendredi, la Croisette est tombée sous le charme de Pénélope Cruz dans Volver, de l'Espagnol Pedro Almodovar. L'autre film présenté vendredi en compétition, Fast food nation, une critique pleine d'humour de l'industrie alimentaire américaine. Deux films bien accueillis par la critique. Aussi, en compétition, on peut distinguer, aux côtés de Flandres de Bruno Dumont, Selon Charlie de Nicole Garcia et Quand j'étais chanteur de Xavier Giannoli pour la France, Marie-Antoinette de Sofia Coppola, Southland Tales de Richard Kelly, Il caïmano de Nanni Moretti et L'amico di famiglia de Paolo Sorrentino pour l'Italie, Red Road de Andrea Arnold et The Wind that Shakes the Barley de Ken Loach pour l'Angleterre El laberinto del fauno Guillermo del Toro et Babel de Alejandro Gonzales Inarritu pour le Mexique, La Raison du plus faible de Lucas Belvaux pour la Belgique, Juventude em marcha de Pedro Costa pour le Portugal, Les lumières du faubourg de Aki Kaurismaki pour la Finlande et Les Climats de Nuri Bilge Ceylan pour la Turquie, le film Indigènes de l'Algérien Rachid Bouchareb. Bénéficiant d'un casting de rêve, à savoir Jamel Debbouze, Samy Nacéri, Roschdy Zem, Sami Bouajila, le huitième long-métrage de ce réalisateur mais aussi scénariste et producteur, revient sur l'histoire de ces soldats africains de l'armée française lors de la Seconde Guerre mondiale. A travers l'histoire d'Abdelkader, Saïd, Messaoud et Yassir, le cinéaste vient rappeler qu'ils furent quelque 130.000 soldats dits «indigènes», dont environ 110.000 Maghrébins et 20.000 Africains, enrôlés dans les offensives alliées d'Italie, de Provence, des Alpes, de la vallée du Rhône, des Vosges et d'Alsace en 1944-1945. Pour Jamel Debbouze, également coproducteur, ce film, sert à «expliquer aux jeunes beurs qu'ils ne sont pas nés en France par hasard». Dans la sélection Un certain regard à Cannes, Rabah Ameur-Zaïmèche, un autre Algérien, revient avec un nouveau film Bled Number One après Wesh wesh en 2001. Dans Bled Number One, le cinéaste tient à nouveau le rôle principal, celui de Kamel, expulsé de France sous le coup d'une double peine. Bled le montre tour à tour enthousiaste et hébété face à ce pays. Dérouté ou contemplatif. Le film est tourné dans son propre village avec une grande partie de sa famille: «On était une équipe d'une vingtaine de personnes venues de France. En dehors d'Abel Jafri qui joue Bouzid, et de Meriem Serbah dans le rôle de Louisa, tous les acteurs vivent dans ce village et sont mes cousins. Quand je leur ai expliqué le projet, ils étaient tous partants. La mise en scène? Je leur donne les dialogues. Si c'est pas bon, on laisse tomber, et je donne juste une ligne directrice. Ils s'en emparent avec leur énergie. » Le film est tourné en six semaines. Et de confier: «Peut-être que les apparatchiks du régime considèreront que j'ai montré une situation sociale qui n'est pas celle de l'Algérien moderne, mais je n'ai jamais eu cette prétention. Je voulais sentir l'Algérie, celle d'aujourd'hui, mais aussi celle d'il y a 10.000 ans. Le film raconte l'histoire d'une femme qui sort des normes d'une société rurale et traditionnelle dont on retrouve les schémas dans tout le pourtour méditerranéen, des sociétés endogames où l'on n'échange pas les femmes, sinon la terre se morcelle».Pour le réalisateur, un lien secret le rattache à l'Algérie. « J'étais de plus en plus en transe, habité par ma terre», dit-il. C'est Transylvania, de Tony Gatlif (avec Asia Argento et Amira Casar), qui fera par ailleurs la clôture, hors compétition, le dimanche 28 mai, du festival de Cannes.