C'est la toute dernière jeune fille à avoir été accueillie par le centre. Amel, 19 ans, a fugué du domicile familial il y a quelques mois. Un cas de figure fréquent dans ce centre. «Je suis arrivée, hier, en fin d'après-midi. C'est la police de la commune de Ben Aknoun qui m'a conduite jusqu'ici», a déclaré la jeune fille. On sait relativement peu de choses sur la première partie de la vie de Amel, née en 1987 à Réghaïa, à l'est d'Alger. Issue d'une famille modeste composée de quatre sœurs et de deux frères, son père est fonctionnaire dans une unité de fabrication de boissons gazeuses. Selon ses dires, elle a quitté sa famille car «elle est trop dure avec moi et je suis souvent battue par ma sœur aînée sans aucune raison valable. En tout cas, je ne regrette pas mon foyer familial». La fugue puis la liberté sont pour Amel une échappatoire à un mode de vie répressif et lui permettent de vivre sans rendre de comptes, laisse-t-elle entendre. Sa famille ne semble pas trop s'inquiéter de son sort puisqu'aucun avis de recherche n'a été déposé au niveau des services de sécurité. Dans ses yeux dissimulant un passé tragique, nous avons compris que la vie de Amel dans la rue n'a pas été aussi paisible qu'elle veut nous le faire croire. Après insistance, elle finit par nous révéler qu'elle a été agressée et violée par un jeune homme du côté de Bab Ezzouar et récupérée, par la suite, par un réseau de prostitution dans le quartier d'El-Hamiz. Pour les psychologues du Samu social, il faudra beaucoup de temps pour connaître la véritable histoire de Amel, car il est courant d'entendre chez ces personnes des versions mensongères pour tenter d'échapper au jugement des autres et peut-être aussi amadouer le personnel.