Estimation n Un tour rapide dans les commerces de produits alimentaires permet de constater que les gâteaux traditionnels coûteront cher cette année. Dans les magasins spécialisés, la tendance est à la hausse. Des femmes entrent, demandent les prix et ressortent aussitôt. «Combien coûte le kilo d'amandes ?» demande une femme ; «1000 DA», lui réplique le vendeur. «Cette année, la baqlawa se fera avec des cacahuètes», dit la bonne femme. Pour le reste des fournitures, les prix ne sont pas moins élevés. Le sucre coûte 60 DA le kilo, la farine 40 DA, le miel 90 DA et la semoule 80 DA ; les cacahuètes sont cédées pour 150 DA le kilo. Quant à l'ingrédient star de l'Aïd, les amandes, leur prix varie entre 700 et 1 200 DA selon la qualité et le fait qu'elles soient épluchées ou non. Les fruits confits ne sont pas très demandés, mais coûtent 450 DA la boîte de 700 g. Dans une pâtisserie de Bab El-Oued, qnidlette, dziriette et autres gâteaux aux amandes ornent la vitrine, faisant tourner la tête aux jeûneurs. Le vendeur déclare que pour les femmes qui travaillent ou qui n'ont pas le temps de préparer des gâteaux pour l'Aïd, les commandes auprès de traiteurs ou pâtissiers se font très tôt. Les prix sont déroutants : 30 DA la pièce pour les gâteaux aux amandes et il faut compter jusqu'à 50 Da pour les slilatte (un gâteau en forme de couffin). Cette année, beaucoup de femmes disent ne pas pouvoir préparer plus de deux variétés de gâteaux. «Il fut un temps où j'en préparais jusqu'à sept», se souvient une femme portant un enfant. Quand on demande à combien revient un plateau de la fameuse baqlawa, la réponse est «2 000 DA» selon un chef pâtissier de la Casbah. De quoi dissuader plus d'un fin gourmet. Les femmes au foyer constatent, impuissantes, la dégradation de leur pouvoir d'achat. «Ces femmes au courage inébranlable essaient, malgré tout, de joindre les deux bouts et d'offrir une vie digne à leur progéniture», estime un vieil homme. Dans beaucoup de gâteaux, et depuis un certain temps, les cacahuètes ont remplacé les amandes. Ainsi, nombre de recettes ont vu leurs ingrédients changer ou remplacer pour causes économiques. «Comme on dit, c'est dans le besoin que naît le génie», ironise Moussa, un quinquagénaire vendeur de diouls. Trouver des alternatives, c'est ce que les femmes algériennes savent si bien faire. Mais cela ne suffit pas toujours à satisfaire les besoins gastronomiques de la famille…