Résumé de la 32e partie n Des passagers de première classe posent des problèmes : des femmes ne veulent pas quitter leur conjoint, des enfants leurs parents, d'autres ont peur d'embarquer dans les canots... Les comportements extravagants ne manquent pas : il y a ceux qui menacent de passer par-dessus bord si on ne les laisse pas monter avec leur conjoint, il y a des dames qui veulent embarquer de force des souvenirs, des enfants qui pleurent parce qu'ils ont oublié dans leur cabine leur poupée ou leur ours en peluche… Certains comportements sont totalement inconscients. C'est le cas d'une richissime dame, Edith Russel, qui a défrayé la chronique du «Titanic» avant le naufrage. Elle a non seulement loué la chambre la plus belle, mais une seconde pour ses vêtements ! Comme tous les autres, elle a été obligée de laisser ses bagages, mais au moment d'embarquer dans un canot de sauvetage, elle se rappelle quelque chose : «Mon cochonnet !» Le garçon qui l'accompagne lui demande de quoi il s'agit. «Mon petit cochonnet de plâtre qui joue une si belle musique... Je l'ai oublié dans ma cabine ! — Il est trop tard pour y retourner, madame ! — Je ne peux partir sans mon cochonnet ! — Les eaux ont dû envahir la cabine... — Allez me le chercher, s'il vous plaît ! Je ne peux partir sans mon cochonnet ! C'est un souvenir inestimable !» Le garçon aurait pu l'envoyer au diable, elle et son cochonnet, mais il préfère, au péril de sa vie, retourner dans la cabine et chercher l'objet. «Merci, merci», s'exclame la dame, comblée, qui consent enfin à monter dans le canot de sauvetage. Le colonel Archibald Gracie, témoin de la scène, n'en revient pas : comment cette dame a-t-elle pu envoyer ce pauvre garçon dans sa cabine et comment celui-ci a-t-il pu risquer sa vie pour un cochonnet en plâtre ? Peut-on encore, dans les moments de danger extrême, respecter de la sorte les riches et les convenances ? Il se rappelle que l'une des dames placées sous sa protection, une certaine mademoiselle Anna, qui voyage seule, n'a pas embarqué. Et si par malheur elle était restée dans sa cabine ? Sans hésiter un instant, il quitte le pont et descend dans les cabines. Les couloirs sont inondés et l'eau arrive aux chevilles, mais le colonel poursuit jusqu'à la cabine de la mademoiselle. «Mademoiselle Anna !» Il frappe. Comme personne ne répond, il pousse la porte de la cabine. «Mademoiselle Anna !» La cabine est vide. Il retourne sur le pont. Et cherche la jeune femme. «Elle vient d'embarquer», lui dit quelqu'un. Il se penche et l'aperçoit. «Colonel, appelle-t-elle, venez, il y a de la place.» L'officier qui procède à l'embarquement ne dit rien, cela veut-il dire qu'il peut embarquer ? Le colonel hésite et finit par dire : «Tout à l'heure, il faut d'abord embarquer les femmes et les enfants !» (à suivre...)