Résumé de la 38e partie n Neeve a rencontré Jack Campell. La dernière fois qu'elle l'a vu remonte à six ans. Il venait d'être président d'édition. Il y avait l'habituel attroupement de gens en train d'attendre un taxi devant le St. Regis. Neeve haussa les épaules, marcha vers la Cinquième Avenue et se dirigea vers le haut de la ville. Il faisait bon. Peut-être couperait-elle par le parc. Rentrer chez elle à pied lui éclaircirait les idées. Mais à la hauteur de l'entrée sud de Central Park, un taxi s'arrêta devant elle et déposa un client. Elle hésita, puis tint la porte et monta dans la voiture. Soudain, la perspective de marcher deux kilomètres supplémentaires perchée sur des talons hauts la rebutait. Elle ne vit pas l'expression de frustration sur le visage de Denny. Il avait patiemment attendu à l'extérieur du St. Regis et l'avait suivie dans la Cinquième Avenue. Quand elle avait commencé à se diriger vers le parc, il avait cru le moment enfin venu. A deux heures du matin, Neeve se réveilla d'un sommeil profond. Elle avait rêvé. Elle se tenait devant la penderie d'Ethel, en train d'établir une liste. Une liste. «J'espère qu'elle meurt de chaud, où qu'elle soit.» C'était ça. Les manteaux. La zibeline. La veste. La cape. Le Burberrys. Le manteau croisé. La redingote. Ils étaient tous là. Ethel avait rendu son article jeudi. Personne ne l'avait vue vendredi. Il avait fait un vent et un froid de tous les diables pendant ces deux jours-là. Il y avait eu une tempête de neige vendredi. Mais chacun des manteaux d'hiver d'Ethel était à sa place, dans sa penderie... Nicky Sepetti frissonna dans le cardigan torsadé que sa femme lui avait tricoté l'année où il était parti en prison. Il allait encore de carrure, mais bâillait au milieu. Nicky avait perdu quinze kilos en prison. Il n'y avait qu'un bloc d'immeubles de chez lui jusqu'à la promenade. Secouant la tête avec impatience au souvenir des recommandations de sa femme — «Mets une écharpe, Nicky. Tu as oublié que le vent de l'océan est fort » —, il ouvrit la porte principale et la referma dernière lui. L'odeur de l'air salé lui piqua les narines et il l'aspira avec bonheur. Lorsqu'il était môme, à Brooklyn, sa mère l'emmenait souvent en autobus se baigner à Rockaway Beach. Il y a trente ans, il avait acheté une maison à Belle Harbor comme résidence d'été pour Marie et les enfants. Elle s'y était complètement installée après sa condamnation. Dix-sept ans qui avaient pris fin vendredi dernier. Sa première gorgée d'air frais hors des murs de la prison lui serra douloureusement la poitrine. «Evitez le froid», l'avaient prévenu les médecins. Marie avait préparé un copieux dîner, en signe de «Joyeux retour à la maison, Nicky». Il était tellement claqué qu'il était allé se coucher à la moitié du repas. Les enfants avaient téléphoné. Nick Junior et Tessa. «Papa, on t'aime», avaient-ils dit. Il n'avait pas voulu qu'ils lui rendent visite à la prison. Tessa venait de rentrer à l'université quand on l'avait embarqué. Aujourd'hui, elle avait trente-cinq ans, deux enfants, et elle vivait en Arizona. Son mari l'appelait Theresa. Nick Junior avait pris le nom de Damiano, le nom de jeune fille de Marie. Nicholas Damiano, expert-comptable dans le Connecticut. (à suivre...)