InfoSoir : Avez-vous constaté un changement dans le rythme du traitement des affaires de justice ? ll Effectivement, depuis l'introduction de nouvelles mesures allant dans ce sens dans les codes de procédures civiles et pénales et les instructions de la tutelle, les affaires civiles et pénales sont traitées d'une manière beaucoup plus rapide et les jugements sont remis aux concernés dans des délais raisonnables. La situation n'a rien à voir avec les lenteurs constatées par le passé. C'est un fait qu'on ne peut pas nier. C'est plutôt la qualité des jugements qui reste discutable. Voulez-vous dire que l'accélération des procédures ne favorise pas l'équité et la neutralité de la justice ? ll Je ne dirais pas qu'il est impossible de rendre des jugements équitables et justes en des délais réduits. Cela est dans les cordes de la justice pour peu qu'un certain nombre de paramètres soient réunis, notamment des ressources humaines suffisantes, la mise à la disposition des magistrats des moyens adéquats, l'amélioration de leurs conditions de travail, le relèvement de leur niveau professionnel et le renforcement de leur liberté et leur indépendance. Même si je dois dire que les mesures prises dans ce sens sont encourageantes, comme le renforcement des infrastructures, l'introduction de l'outil informatique ou le recrutement de nouveaux magistrats, il n'en demeure pas moins qu'elles restent insuffisantes pour relever un tel défi. Avez-vous constaté une hausse du nombre de recours ? ll C'est incontestable. Le nombre de pourvois en cassation est en nette progression. Même si je ne dispose pas de données précises, je vous cite un exemple. En 2005, les juridictions ont été instruites de traiter toutes les affaires pendantes. Ce qui a été fait, mais un grand nombre des jugements rendus a fait l'objet d'un appel au niveau de la Cour suprême. Quand une partie se sent lésée, elle utilise les voies de recours prévues par la loi. L'impératif de faire vite a fait que certains magistrats ne découvrent les faits des affaires qu'ils jugent que le jour du procès. Ce n'est pas normal. Et puis, quelles que soient ses compétences et ses qualités, le magistrat ne peut pas traiter avec équité et simultanément un nombre très élevé d'affaires. Le ministère a également fait état de l'accélération des procédures d'exécution… ll Moi qui suis sur le terrain, je n'ai pas cette impression. Je rencontre régulièrement des cas de justiciables qui ont obtenu gain de cause auprès de la justice mais qui attendent toujours l'exécution du jugement. Des lenteurs sont notamment perceptibles dans l'exécution des décisions d'expulsion et des jugements entrant dans le cadre des conflits de travail, comme la réintégration des travailleurs licenciés. (*) Avocat au Barreau d'Alger, agréé à la Cour suprême