La bouche revêtit une grande importance parce que c'est par elle que passent le souffle et la nourriture qui font vivre, et c'est par elle aussi, que sort la parole. C'est pourquoi, dans la plupart des cultures, elle est le symbole de la force créatrice, de l'introduction de l'âme. Les Egyptiens pratiquaient sur leurs défunts le rite de l'ouverture de la bouche qui consiste à faire ouvrir avec un burin la bouche de sorte que le mort, au moment du jugement de l'Au-delà, puisse parler, se défendre et dire la vérité. La bouche ouverte, il pourra aussi recevoir, par la bouche ouverte, le souffle de la vie nouvelle. On lui place un disque d‘or sur la bouche, de façon à lui faire partager la vie du Dieu Ré, le Dieu soleil, symbole de vie. enfin, parmi les prières contenues dans le Livre des Morts, il y a cette prière que l'on lit : «Rends-moi ma bouche pour que je puisse parler.» Dans beaucoup de cultures, la bouche est liée à la parole, elle est alors un symbole ambivalent, puisque la parole peut être de miel comme elle peut être de fiel. Dans un conte algérien (que l'on retrouve aussi chez Perrault) une jeune orpheline, persécutée par sa marâtre, se rend à la fontaine où elle rencontre une vieille femme qui lui demande de l'aider à remplir son amphore. La jeune fille le fait et lui transporte même son amphore : la vieille, qui est une fée, lui donne le don de transformer en or toutes les paroles qu'elle prononcera. La marâtre, jalouse de ce don, envoie sa fille à la fontaine : comme c'est une jeune femme qui se présente à elle, et non une vieille, elle la rabroue : ce ne sont pas des pièces d'or qui vont sortir de sa bouche mais des serpents et des scorpions !