Halte n 13h 15. Rabéa ne paraît pas fatiguée, mais préfère se mettre sous un grand et bel olivier. On s'installe sur l'herbe, bercées par le bruissement des feuilles des arbres. Notre aventurière commence à déballer son sac à dos : une bouteille d'eau, un repas froid à base d'herbes (boulettes à la vapeur à base d'herbes et d'huile d'olive, des sardines farcies, du pain d'herbes et des oranges au dessert... mais pas aux herbes cette fois-ci !! ) «c'est une cuisine thérapeutique et bio. parfois, je découvre sur mon chemin des fruits sauvages. Je ne consomme jamais de boissons gazeuses. Je mange sain et je bois sain», dira-t-elle. «Le mont Chenoua est magnifique», s'exprimera-t-elle en s'allongeant sur l'herbe. Après une pause de près de une heure et demie, on fait le tour de cet endroit féerique qui s'ouvre directement sur la mer. «Les chenouis habitant aux alentours de la mer préparent généralement des plats à base de poissons, d'algues, d'oursins et de plantes, tel le couscous aux poissons que beaucoup de familles ont oublié.» Rabéa ne s'est remise à respirer une grande bouffée d'oxygène que ces dernières années, puisqu'elle ne pouvait se rendre en montagne au cours de la décennie noire, nous confiera-t-elle. Elle se contentait alors d'explorer des champs surveillés ou ceux qui se trouvaient aux abords des routes pour compléter ses randonnées sur les plages de Tipaza. Et ce, afin de ne pas interrompre une activité qu'elle a dans le sang. Il est 15h 30. Après 2 heures de marche du chenoua vers tipaza-ville, l'aventure prend fin avec Rabéa, en compagnie de laquelle on ne peut s'ennuyer. Les bras pleins de plantes de différentes sortes, un bouquet pour des boulettes à la vapeur à base de 12 plantes à côté d'un autre de 24 herbes, Rabéa se désolera enfin, qu'elle n'ait pas été accueillie à bras ouverts à ses débuts dans ce domaine. Elle s'est en effet heurtée à un état d'esprit et des mentalités selon lesquels la consommation d'herbes est signe d'archaïsme loin de toute modernité. Pourtant, Rabéa a exporté cette cuisine hors de nos frontières. «Mon but est de poursuivre mon combat pour la sauvegarde de ce riche patrimoine, car la cuisine chenouie a toujours été une cuisine économique, naturelle, saine et à la portée de toutes les bourses.» Actuellement, elle entreprend une recherche sur toutes les variétés d'herbes du mont Chenoua et de tout le bassin méditerranéen. «je suis en train d'inventorier les plantes comestibles pour réaliser plusieurs spécialités ordinaires et des recettes de poissons à base de plantes telles la mauve (el-medjir), l'ortie (bouzordouf), le pissenlit (aghitagmerth), les épinards (abidhest), les cardes sauvages (el-garnina), le pouliot (fliou), le palmier nain (el-doum) et le pourpier sauvage (merdjila). Tous les week-ends, Rabéa continue d'enfiler son sac à dos et reprendre le chemin de l'aventure. «Je préfère aller à la rencontre de la nature plutôt que de faire les magasins. Je sais qu'il reste encore beaucoup à faire. Et l'aventure continue !!»