Résumé de la 33e partie n Les comportements extravagants ne manquent pas sur le «Titanic» en perdition, telle cette femme qui envoie chercher dans sa cabine un cochonnet à musique qu'elle a oublié. Il y a aussi les comportements admirables, faits d'abnégation, voire d'héroïsme. Nous avons déjà cité le cas de Isidor et Ida Strauss : Ida a refusé de monter dans une barque et a préféré rester avec son époux : «Nous avons toujours vécu ensemble, a dit la femme, je ne vais pas le laisser mourir seul !» Il y a aussi le cas de Benjamin Gugenheim, un industriel et un aventurier américain, connu pour ses frasques. Il est le fils d'un richissime immigrant suisse, le baron Meyer Gugenheim. Il a 47 ans au moment des faits, il est marié et père de trois enfants, en dépit de cela, il accumule les maîtresses, et la dernière en date est une jeune Française, la chanteuse Léontine Aubart, qu'il a embarquée avec lui de Cherbourg. Il est accompagné d'une femme de chambre et d'un valet. Dès que l'alerte a été donnée, il s'est précipité sur le pont avec sa maîtresse et ses domestiques. «Les femmes et les enfants d'abord, a dit le capitaine Smith.» Il se renfrogne aussitôt : «Je ne suis pas venu pour moi-même…» Il pousse en avant Léontine et la femme de chambre. «Allez, allez !» Un steward lui tend un gilet de sauvetage. «Je n'en ai que faire», dit-il. Cependant, il a une demande à faire : «Dites à ma femme, qui se trouve à New York, que j'ai fait mon devoir pour mourir en gentleman !» Il demande à son valet de l'attendre sur le pont. Il retourne dans sa cabine et revient, quelques instants après, en costume de cérémonie, fumant le cigare et buvant le brandy, en compagnie de son valet qui a décidé de rester avec lui. Les deux hommes figureront parmi les victimes. Léontine et la femme de chambre, elles, seront récupérées par le «Carpenthia» qui les déposera à New York. Sur le quai se trouvent la femme de Gugenheim, Florette et ses fils. Ils cherchent leur parent des yeux, parmi les rescapés. «Hélas, dit un homme qui connaît bien Gugenheim, le pauvre homme est mort...» Et il raconte à la jeune femme éplorée, la fin admirable de son mari. Heureusement qu'elle n'a pas entendu la réflexion d'un officier qui dit à voix basse : «Sa maîtresse vient de passer devant vous !» Florette devra apprendre, un peu plus tard, que son époux a dilapidé une grande partie de sa fortune, ne laissant à la veuve et aux orphelins que 450 000 dollars : il a dépensé plus de 8 millions de dollars ! Mais sa fin devait tout racheter : les gens ne garderont pas de lui l'image du play-boy, coureur de jupons et dépensier, mais celle d'un gentleman qui a choisi de mourir dans la dignité (à suivre...)