Résumé de la 98e partie n Lally ayant remarqué la présence d'un couple dans un réduit de la gare, va tenter de le faire déguerpir… Rosie hésita. «Pas avec Olendorf dans le coin. Il regarde justement par ici.» Mais rien ne pouvait dissuader Lally. Elle attendit de voir Olendorf partir déjeuner, et se faufila sur le quai. Le train de 12h 10 se remplissait ; elle savait qu'on ne la remarquerait pas. Elle disparut de l'autre côté de la voie, descendit la rampe aussi vite que le lui permettaient ses genoux pleins de rhumatismes. Elle ne se sentait vraiment pas bien. C'était I'hiver le plus dur qu'elle ait connu. L'arthrite s'était mise dans son dos à présent, et dans la plante des pieds. Elle avait mal partout. Elle n'avait plus qu'une envie, s'étendre et se reposer sur son propre lit. Elle allait faire déménager la fille dans les deux minutes. «Ma petite, lui dirait-elle, les flics sont prévenus. Ils viennent vous arrêter. Filez et avertissez votre petit ami.» ?a marcherait. Elle avança à pas traînants devant les générateurs, les tuyaux d'égout. Au bout se dessinait le tunnel, sombre et silencieux. Elle leva les yeux vers la porte de sa pièce et sourit de contentement. Encore huit pas et elle était au bas des escaliers. Elle fit glisser les poignées de son sac sur son bras, extirpa la clef de sa veste. De l'autre main, elle s'accrocha à la rampe et se hissa sur les marches. «Où allez-vous comme ça, Lally ?» La voix était sèche. Lally laissa échapper un cri de frayeur et faillit tomber à la renverse. Elle reprit son équilibre et, pour gagner du temps, se retourna lentement avant de faire face à la silhouette menaçante d'Olendorf. Ainsi, il l'avait gardée à l'œil, juste comme le craignait Rosie ; il avait essayé de l'avoir en faisant semblant d'aller déjeuner. Elle fit glisser subrepticement la clef dans son sac. L'avait-il vue ? «Je vous ai demandé où vous alliez, Lally ?» Près d'elle, les générateurs vrombissaient. Un train s'engageait en hurlant sur un quai quelque part au-dessus de sa tête. Elle restait sans un mot, impuissante. Soudain, un crachement strident, un miaulement féroce, jaillit d'un coin d'ombre. Et l'inspiration frappa Lally. Les chats ! D'une main tremblante, elle désigna les formes squelettiques et fuyantes. «Regardez, ils sont affamés ! J'étais venue leur apporter quelque chose à manger. J'allais le leur donner.» Elle tira vivement de son sac la serviette déchirée, pleine des restes de beignets. Le garde jeta un œil dégoûté sur le vieux chiffon graisseux, mais sa voix était un peu moins hostile quand il continua. «Je suis désolé pour eux, mais vous n'avez rien à faire ici, Lally. Jetez-leur votre fourbi et fichez-moi le camp.» Son regard la dépassa, monta le long des escaliers, s'attarda pensivement sur la porte de la pièce. Le cœur de Lally battait à tout rompre. Elle ramassa son sac, clopina à la rencontre des chats, leur secoua les quelques miettes, et les regarda se ruer dessus. (à suivre...)