Coup d??il Son premier regard est pour «trik Sétif» d?où arrivent généralement les convois militaires en opération dans les Aurès. Les premières lueurs de l?aube éclairent la montagne et le vieux Ameur sort de son «haouch» de pierre, la tête cachée par le capuchon de sa lourde kachabia. Il fait déjà très froid par ces matinées d?octobre qui annoncent un hiver rigoureux. Il s?immobilise un moment pour «humer» l?air, tout est silencieux le petit hameau, enveloppé d?un brouillard léger, semble dormir. Sans bruit il longe les murs de toub, marchant dans l?herbe épaisse mouillée par la rosée. Au bout du chemin, il s?arrête se retourne et reste un moment immobile comme une statue de pierre, pour être sûr de ne pas être suivi.... Alors il prend le chemin qui monte vers son poste d?observation, un arbre aux branches larges étendues, sur lequel il peut grimper facilement, enraciné sur une haute crête d?où il aperçoit toute la plaine qui s?étend sous les contreforts d?Arris. Quand il arrive au sommet, le brouillard s?est dissipé et la vue est claire. Son premier regard est pour la route «trik Sétif» d?où arrivent généralement les convois militaires en opération dans les Aurès. Aussi loin que porte sa vue, la route est libre, venant du nord-ouest zigzaguant entre les collines, enroulant ses lacets autour de la chaîne montagneuse qui mène vers Batna. ?Ouêch Ameur ? Le vieil homme sursaute. Messaoud silencieux comme un chat, le surprend toujours. Il grimpe à sa hauteur et les deux hommes se serrent la main. ?Rien à signaler, pour le moment ! Qu?as-tu apporté ? ?De la galette, des olives des dattes et un peu de lben. ?Bien, Salem alikoum ! Et Ameur descend tandis que Messaoud prend sa place sur la grosse branche. ?Le bonjour aux khaouas ! lance-t-il. Ameur saisit le couffin déposé au pied de l?arbre et, d?un pas rapide, redescend du côté opposé au douar. Il marche un bon moment, s'accrochant d?une main aux broussailles et enfonçant ses talons éculés dans la terre recouverte d?un tapis de feuilles mortes, encore humides pour ne pas dégringoler le long des pentes. L??il aux aguets, il s?enfonce dans la forêt et se dirige vers une clairière. Il dépose son couffin et se penche sur un grand trou béant en criant : ?Héou ! vous êtes là ? Des cris joyeux lui répondent, et un homme apparaît levant les bras pour recevoir le couffin ?Ah, Ami Ameur ! Nous t?attendions avec impatience ! Ameur se glisse à l?intérieur de la casemate, accueilli par des exclamations de joie. ?Ah, y a derguez ! ami Ameur ! comment ça va dehors ? ?Pour le moment c?est calme ! (à suivre...)