Ils ne sont ni de l'Algérie d'en haut ni de celle d'en bas. Ils ont la terrible sensation d'être et de vivre dans un «nul part» où les griffes de la misère les prennent à la gorge. Ils s'interrogent si un jour les effets de l'indépendance finiront par les atteindre. 11h 15. Direction Tamezguida, dans la commune de Béni Haoua, à la limite de Tipaza dans la wilaya de Chlef. Près de 30 camionnettes bâchées, bondées de passagers – certains debout et qui ont pourtant payé 50DA leur place – vont à Sidi Abdelkader pour profiter de la waâda. Ils emplissent l'air de chants chenouis et berbères. C'est donc jour de fête à Tamezguida. En l'espace de quelques heures, le village sort de sa torpeur, oublie sa misère et son isolement. Ici, les temps sont durs. Les Tamezguidis, venus pour la plupart des villages environnants après avoir fui le terrorisme durant la décennie noire, parcourent plus de 4 à 10 km à dos d'âne ou à pied pour chercher de l'eau potable. Aucune commodité n'agrémente leur vie. Pas d'eau potable, pas d'électricité : la télévision et le réfrigérateur sont donc, pour la majorité, un luxe interdit – pourtant certains habitants ont effectué des installations très dangereuses pour alimenter leurs gourbis. Ils sont là à combattre les maux, les souffrances, la chaleur, le froid, la faim… Nous vous faisons part de la journée que nous avons partagée avec les Tamezguidis, si simples et si généreux malgré leur dénuement.